Courriel Saurelois
Une chronique sur l'histoire de Sorel
de Roland Plante

20 septembre, 2019

En collaboration avec :

L’électrification de la ville et le début du métier d’électricien
Madeleine Blanche Lussier et Roland Plante

L’électrification de Sorel a suivi le développement de l’éclairage dans la métropole, Montréal. En effet, dès 1847, la Montreal Gaz company est créée. Dès les années 1850-60, on utilise des turbines et des roues hydrauliques pour propulser les moulins à scie et à grain.

En 1879, Thomas Edison invente une ampoule électrique, il débute aussi dans la même période la production de génératrices électriques à courant continu (CC), ce qui aide à introduire l’hydroélectricité en Amérique du Nord.

D’autres découvertes suivent rapidement. Ainsi, le 4 septembre 1882, la compagnie d’Edison, l' « Edison Electric Light Company » fonde la première centrale électrique à charbon du monde, la Pearl Street Station, à base de 6 dynamos Jumbo, pour produire du courant continu dans le quartier de Wall Street à Manhattan, pouvant éclairer 85 maisons, bureaux ou boutiques. Un an plus tard, d'autres centrales toujours plus puissantes éclairent plus de 430 immeubles new-yorkais avec plus de 10 000 ampoules.

Plus près de nous, en 1878 à Montréal, on utilise pour la première fois l’éclairage électrique au Canada.

C’est J.-A.-I. Craig, commerçant prospère de Montréal, qui fait l’essai d’une lampe arc électrique à l’automne 1878, coin Bleury et Dorchester, au Collège Sainte-Marie (Jésuites). La même année, le journal La Minerve commente une autre expérience réalisée au Champ-de-Mars, à Montréal : « Plusieurs milliers de spectateurs se sont déclarés satisfaits ». On parle même de « soleil de minuit ». Chose certaine, il s’agit d’une invention qui révolutionnera nos façons de vivre. Gaz et électricité se disputent la faveur du public. Les compagnies aussi se font concurrence pour l’obtention des contrats d’éclairage des rues. Rapidement, la « Montreal Light, Heat and Powwer Company » élimine toute la concurrence alors qu’ailleurs dans la province, c’est la « Shawinigan Water and Power Company » qui commence avec un aménagement sur le Saint-Maurice, près de Trois-Rivières.

[…] Une société est créée dans le but de doter Sorel de l’éclairage au gaz, le 29 octobre 1855. Trois ans plus tard, selon l’auteur Philippe Sainte-Marie, les importants hommes d’affaires Thomas McCarthy et Jacques-Félix Sincennes sont envoyés à Palmira, dans l’État de New York, pour y étudier le système à gaz Aubin, du nom de son inventeur, Napoléon Aubin, et pour amorcer des négociations dans le but d’implanter ce procédé à Sorel. La Gazette de Sorel informe toutefois ses lecteurs, en juin 1858, que monsieur Baumann, l’agent au Canada de la maison Aubin, s’affaire déjà à l’implantation de l’éclairage au gaz à Sorel et à Saint- Hyacinthe. Dès le mois suivant, le conseil de ville autorise la formation de La Compagnie de Gaz de Sorel et lui permet d’installer des conduites à travers les rues soreloises. Malgré tout, l’usine est toujours inopérante, deux ans plus tard : « Depuis près de deux ans Sorel possède une usine au gaz et cependant nos rues ne sont pas encore éclairées». Le conseil de ville décide d’autoriser « les dépenses nécessaires pour l’éclairage des Rues qui sont pourvus [sic] de fanaux et étaient autrefois éclairées par le gas [sic], au moyen de lampe à l’huile de charbon», le 3 novembre 1862.

À Sorel, des citoyens portent plainte en 1884 parce que les réverbères au gaz des rues demeurent allumés toute la journée. Le gaz n’étant pas illimité, on dénonce le gaspillage.

Dès ses débuts, la compagnie devient une filiale de « Shawinigan Water and Power Company ». En 1889, un barrage avait été construit à Shawinigan et en 1903, l’électricité, qui y est produite, est aussi utilisée pour alimenter la ville de Montréal.

Le 8 août 1903, la Shawinigan Water and Power Company signe un contrat avec la: “Sorel Light Heat and Power Company”. La “ligne” passe de Shawinigan par Joliette, Lanoraie et traverse à Sorel par câble sous-marin.

Un dénommé Joseph Simard vient habiter en 1908 chez sa sœur Marie, épouse d’Armand Petitclerc. Il se trouve du travail l’année suivante comme commis à la ville de Sorel. Il quitte ensuite cet emploi pour travailler pour la « Sorel Light, Heat and Power Co » et en 1914, il en devient surintendant. La même année, il épouse dame Rose-Blanche Pontbriand, fille d’Arthur T. Pontbriand, président de cette compagnie.

Un jeune frère de Joseph Simard, J. Édouard, arrive à Sorel en 1914. Après un bref séjour au collège Mont-St-Bernard, il devient apprenti-électricien. Il fera aussi études en électricité à Shawinigan. Après avoir appris le métier à l’atelier de M. Stanley Lunan, il devint entrepreneur dans ce domaine. Dans ses temps libres, il vend des grille-pains et des fers à repasser électriques de porte en porte. Stanley H Lunan (1889-1969) fut le premier à implanter l’électricité à Sorel. Il avait un atelier et comptât parmi ses employés Messieurs. Édouard Simard et Léo Péloquin. Il vendait des récepteurs radio de marque Rogers Majestic.

Le 10 juillet 1903, la compagnie électrique de Sorel devint une filiale de la « Shawinigan Water and Power Company ».

En 1928, Joseph Simard vend ses parts dans la “Sorel Light and Power à la Shawinigan Water and Power Co”.

Une des plus importantes industries locales, elle a permis à un bon nombre de sorelois d’acquérir les connaissances nécessaires pour devenir électriciens. Parmi ceux-ci, J.P. Paul Cardin, qui se perfectionna grâce à des cours par correspondance, et dont les fils poursuivirent des carrières dans ce domaine et dans celui de la radio. Il y avait aussi Tancrède De Grosbois, M. Champagne et Raoul Morin.

Les premiers compteurs avaient une capacité de 30 ampères et 110 volts, ce qui limitait le nombre de lumières et de prises électriques. L’installation de ces compteurs à l’intérieur des maisons déjà construites n’était pas très esthétique. Les fils courraient au plafond. Loin de s’en cacher, les gens en tiraient une fierté. Ils avaient l’électricité!!!

Le métier d’électricien devient de plus en plus populaire et ouvre de nouveaux horizons! Voici quelques noms bien connus dans la région :

Ulric Cardin & frère vend des récepteurs radio Atwater Ken et plus tard le RCA Victor et le Philco. Gérard Cardin décédé 1992. Ulric Cardin a fondé en 1927 un magasin et un atelier spécialisé en radio. Leur père, Joseph, Pierre Paul était chef électricien au chantier du gouvernement, il est décédé en 1939.

Octavien Péloquin, Maître-Électricien. Il créait des radios à trois lampes de sa fabrication, montés dans un cabinet et qui se vendaient 125$.

• Michel Rousseau est Chef-électricien à la Quebec, Montreal, Southern, Railways (QMS).vers 1928.

Olitor Ménard, Maître-Électricien. Après des études au séminaire de Saint-Hyacinthe, il est au service de Valois et Frères comme vendeur de vêtements, au salaire de 1.25$ par semaine. Ce magasin était situé au coin des rues Augusta et du Roi. .Les commis expérimentés de chez C.O. Paradis gagnaient de 17 à 20$ par semaine.

M. Ménard fut initié à l’électricité lorsqu’il obtint un emploi au chantier maritime du gouvernement fédéral, situé du côté de Saint-Joseph de Sorel, à l’embouchure du Richelieu. L’emplacement fut par la suite occupé par l’usine Sorel Industries Limited, par Crucible Steel, et par Les Forges de Sorel. Il obtint son emploi en 1927, grâce à ses cousins Valois, qui étaient du parti libéral et par le député provincial. J.C.A. Turcotte. C’est ainsi que ça fonctionnait à cette époque!!! Il suivit des cours par correspondance en électricité et en dessin.

Il devient par la suite électricien au service de l’usine d’entretien des chemins de fer Québec, Montréal & Southern. Cette usine, située sur la rue Victoria près de la rue Elizabeth, utilisait 200 hommes.

Les premières émissions radiophoniques produites à Sorel furent l’œuvre de M. Olitor Ménard. Il avait aménagé un poste émetteur dans sa maison, située au 95 de la rue Limoges. Le poste identifié par les lettres OMX de Sorel diffusait le dimanche soir pendant les années 1930. Des musiciens locaux soit des accordéonistes, des chanteurs, des chanteuses, des violonistes, des joueurs de clarinette, un instrument qu’il jouait lui-même, se produisaient à l’antenne qui diffusait jusqu’à Berthier.

Il fut alors sollicité par des marchands pour faire de la publicité. De leurs compétiteurs portèrent plainte. N’ayant pas obtenu un permis du gouvernement, la Gendarmerie Royale l’obligea à cesser ses opérations.

Pour installer l’électricité en ville, son employé utilisait un tri-porteur avec une boîte qui contenait ses outils, son fil, ses isolateurs, dont Roméo Pallardy, Émile Côté, Aimé Bibeau, Marcel Houle. Seul Marcel Houle ne fut pas enrôlé pendant la guerre car il ne réussit pas les examens de l’armée. Les autres furent exemptés en travaillant dans les usines participant à l’effort de guerre.

Quand il eut à électrifier les rangs de Saint-Robert, Olitor Ménard acheta une auto. N’ayant pas de permis de conduire, son cousin, Jean-Jacques Valois, au service du ministre P.J.A. Cardin, allait reconduire les ouvriers le matin et les ramenait le soir. Dans un rang, ses premiers clients commandaient le strict minimum. Plus loin, un autre pouvait commander un système plus puissant. Il devait recommencer les premières installations quand les premiers clients en voyaient l’utilité.

Olitor Ménard fonda l’association des Maîtres-Électriciens Richelieu-Yamaska vers 1950. Elle dura environ 4 ans. Cette association et celle de Montréal ont été fusionnées pour former la Corporation des Maîtres électriciens de la province de Québec. Olitor Ménard transmis sa passion à ses fils, Fulgence, Serge, Blaise et André. Un de ses petit-fils travaille toujours dans le domaine en élargissant l’entreprise à la réparation d’électro-ménagers.

Lucien Degrandpré. (1920-1971). Après ses études au Mont-Saint-Bernard, Il travaille comme comptable pour la Cie électrique de Sorel pendant quelques temps avant de fonder en 1921 ce que nous connaissons comme « la fabrique de balais », rue Hôtel-Dieu.

• Léo Péloquin (1929 -1972), entrepreneur électricien. Il est le fils de Calixte Péloquin et d’Albina Cournoyer, A sa sortie du collège, il apprend le métier d’électricien avec J. Édouard Simard à l’atelier de Stanley Lunan. Il entre au service de son oncle, Octavien Péloquin, entrepreneur électricien. En 1929, il achète l’entreprise de M. Stanley H. Lunan, située au coin nord-ouest des rue Roi Charlotte, l’édifice est nommé Sorel Light & Power. Il occupa le poste d’échevin pour la ville de Sorel de 1956 à 1967. Parmi ses employés, notons son frère, ses neveux Bernard et Fernand Cournoyer, Guy Mandeville et Armand Plante.

J.P. Gérard Cardin (1933-1992.), maître-électricien licencié. Né le 21 juin 1913, il est le fils de J.P. Paul Cardin, électricien et de Marie-Ola Ethier. Il fait ses études à l’Académie du Sacré-Cœur et à l’École des Études Techniques de Montréal. Il est membre de la Corporation des Maîtres-Électriciens du Québec. En 1933, il fonde son commerce spécialisé en électricité, mécanique et soudure industrielle et commerciale. Son frère Roch travaille dans cette entreprise.

• Jean-Louis Charbonneau (1944-2007). Entrepreneur électricien. Il est né le 17 octobre 1920 et il est le fils d’Arthur Charbonneau, entrepreneur et de Marie Ellenberg. Il fait ses études à l’Académie du Sacré-Cœur et par correspondance à l’institut Coyne Electric de Chicago. En 1944, il fonde une entreprise spécialisée dans l’installation et l’entretien de machines à contrôle automatique dans l’industrie et sur les navires.

Fernand Lefebvre (1922-1992). Entrepreneur électricien, il a un magasin sur la rue du Roi et outre le métier d’entrepreneur, il vend des luminaires. Il sera impliqué président de la commission scolaire de Sorel et deviendra le premier président de la commission scolaire régionale Carignan. Il dirigea les destinées scolaires de notre région pendant près de quinze ans. .La polyvalente de Sorel porte son nom

• Jean-Marie Cardin. Né le 13 août 1916, fils de J. P. Paul Cardin, électricien et de Marie-Ola Ethier. Il fait ses études à l’Académie du Sacré-Cœur et à l’École des Études Techniques de Montréal. En 1951, il fonde sa propre entreprise en électricité, chauffage à l’huile et à l’électricité, système de réfrigération, d’air climatisé et dans les systèmes d’alarme. Il est membre de la Corporation des maîtres-électriciens du Québec.

L’électricité supplanta rapidement le gaz et se propagea rapidement dans les foyers de la région. Des débuts modestes de l’électrification à l’omniprésence de cette invention, qui aurait imaginé que notre vie serait « électrique et électronique » et que nous ne saurions nous en passer!


Voici, ci-dessous, quelques photos illustrant notre propos.


Madeleine Blanche Lussier et Roland Plante
Sources : M. Joseph Cardin, M. S.Hale et Dawn Lunan, M. Fulgence Ménard.

 

 

 

Source : Roland Plante, Courriel Saurelois

Bookmark and Share

PUBLICITÉ

------------------------

------------------------

Le SorelTracy Magazine
une filiale des Productions Kapricom
Tous droits réservés
© 2000-2019