LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : jeudi 05 février 2015 13:18

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NÉCROLOGIE

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Robert
Barberis-Gervais

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L'opinion exprimée dans le cadre de cette chronique, est celle de son auteur
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jeudi 05 février 2015

Pourquoi la commission Charest-Charbonneau est décevante
par Robert Barberis-Gervais

Vers la fin de mai 2013, j'ai publié un texte intitulé : « Me Sonia Lebel et son témoin chouchou Gilles Cloutier » avec comme sur-titre : « Peut-on se fier à un organisateur libéral ? »

Le procès de Boisbriand a mis en lumière une fois de plus le peu de crédibilité de Gilles Cloutier mais on le savait déjà : il est accusé de s’être parjuré trois fois. Son ex-conjointe le décrit comme un "menteur pathologique". Elle en avait averti la Commission qui n'en avait pas tenu compte. Elle vient de recevoir une lettre d'excuses d'un enquêteur de la Commission.

Voici ce que j’écrivais en mai 2013 sur Gilles Cloutier et la Commission Charbonneau. C'est utile de se le rappeler au moment où Me Sonia Lebel et la commission elle-même viennent d'être mis dans l'embarras dans le cadre du procès pour fraude de Boisbriand.

« Gilles Cloutier est un organisateur libéral qui a été pendant dix ans sur la liste de paie de Roche où il se rapportait à Marc-Yvan Côté, ancien ministre libéral qui se promenait avec une valise pleine de cash dans l’Est du Québec (voir la commission Gomery) et qui acceptait ses comptes arrondis de dépenses.

Il avait sans doute une façon d’organiser des élections municipales qui était efficace mais sa méthode impliquait deux budgets, un officiel et un officieux qui ne respectait pas la loi électorale puisqu’il dépassait la plafond des dépenses permises par la loi. A ce propos, on a assisté à un échange surréaliste entre Me Sonia Lebel et un avocat qui contre-interrogeait Gilles Cloutier. Cet avocat a essayé de faire dire au témoin que sa façon d’organiser des élections était malhonnête. Me Sonia Lebel est intervenue pour dire que voler une élection impliquait qu’on remplissait des boîtes de scrutin de faux bulletins de vote et que comme Gilles Cloutier n’avait jamais fait cela, il n’avait jamais volé une élection. Avec ce genre de raisonnement, Robin Philpot n’aurait jamais pu intituler son livre sur le référendum de 1995 : « Le référendum volé ».

On a ensuite appris que Gilles Cloutier n’a jamais été le propriétaire de la fameuse maison de Pointe-au-Pic où il offrait des vacances à des « amis » dans le développement des affaires mais qu’il en était le locataire. Pris en flagrant délit de mensonge, Cloutier a admis qu’il avait menti « par orgueil » dit-il. La question s’est alors posée : pourrait-il mentir aussi par partisanerie politique ?

Examinons l’histoire rocambolesque de l’échange de sa maison avec celle d’un Hells Angels, Denis « pas fiable » Houle, en 2000, à Blainville, avec un paiement de 105,000$ cash que Cloutier a reçu. Il s’agissait de raconter une histoire pour qu’on ne pense pas que le sieur Cloutier, organisateur libéral, faisait affaire volontairement avec un Hells Angels. Racontant une visite à Piémont au repaire des Hells, c’est là qu’il aurait appris qui était « Pas fiable » Houle. Vertueux comme il était, il n’était pas question de faire affaire avec un motard criminalisé. Refusant la transaction, le Hells « l’écume à la bouche » « sortit son gun » et c’est sous la menace que la transaction se fit. Quand j’ai entendu « l’écume à la bouche », je me suis dit : on est dans un roman de Dostoiveski. Même l’histoire du gun a été niée par un témoin.

Puis vint l’histoire de Chevrette que Cloutier a pris la peine de répéter deux fois sans que personne ne le lui demande. Il faut croire qu’il y tenait à ce 25,000$ donné à un ami de Chevrette et à l’accusation faite contre Chevrette d’avoir magouillé (répété cinq fois) dans le dossier de la route 125. A ce propos, une entrevue de Chevrette à Anne-Marie Dussault nous a appris que Guy Chevrette, lors d’une rencontre avec les enquêteurs de la Commission Charbonneau, avait nié toutes les accusations de Cloutier. Or, Me Sonia Lebel n’a pas cru Guy Chevrette puisque, le lendemain, elle a laissé parler Gilles Cloutier. Elle a préféré croire Gilles Cloutier. Je crois qu’elle commence à le regretter.

Mais la cerise sur le sundae, la voici. Vous vous souvenez de l’histoire si touchante qui nous avait amené les larmes aux yeux. Gilles Cloutier aurait agi sur le maire de Saint-Stanislas-de-Kosta Maurice Vaudrin pour obtenir un contrat pour Roche en l’invitant à une soirée des Expos puis à assister à une partie du Canadien au Centre Bell. Cloutier a raconté comment il avait demandé à Jean Béliveau de remettre un chandail autographié au petit-fils du maire qui les accompagnait, un geste qui avait arraché des larmes. Or, on n’est plus ici dans Dostoeivski mais dans un roman de Balzac.

En effet, la veuve du maire, Huguette Longtin, est catégorique. Son mari n’a jamais assisté à une partie des Expos, n’a jamais mis les pieds au Centre Bell et n’a jamais rencontré Jean Béliveau. Elle a appelé ses deux petits-fils : ils n’ont jamais accompagné leur grand-père à une partie du Canadien. Et « ils sont fâchés » rapporte Pierre-André Normandin dans « La Presse » du samedi 25 mai 2013 page A11.

Celui-ci ajoute : « De plus, Huguette Longtin affirme que Gilles Cloutier se trompe quand il dit avoir appris à son défunt mari à truquer une grille d’évaluation pour favoriser l’octroi d’un contrat à Roche. Elle brandit une résolution du conseil municipal démontrant que Maurice Vaudrin n’a pas siégé au comité technique en question.

« Je n’ai pas d’ordres à donner à la Commission, mais je souhaiterais que Gilles Cloutier soit accusé de parjure pour tous les mensonges qu’il a dits », plaide Mme Longtin. Le titre de l’article est : « Autre demande d’accusation de parjure contre Gilles Cloutier ». La première demande vient de Guy Chevrette qui accuse Gilles Cloutier de mythomanie et de mensonge éhonté.

Dans le monde juridique, on dit que l’abondance des détails établit souvent la véracité d’un témoignage. Nous sommes ici devant un exemple contraire. L’écume qui sort de la bouche de Denis« pas fiable » Houle, c’est trop. Le chandail de Jean Béliveau, la famille du maire l’aurait encore gardé précieusement si c’était vrai.

La Commission Charbonneau est donc dans l’eau bouillante. J’ai une question à poser à la procuteure-chef Me Sonia Lebel. Etes-vous toujours fière de votre témoin chouchou Gilles Cloutier ? Et avez-vous eu raison de le chouchouter ?

Est-ce qu’on peut se fier à un organisateur libéral aussi croche que cet employé de Roche ? Me Lebel, vous avez une excuse : vous êtes bien jeune. Si vous aviez connu les libéraux de Robert Bourassa, vous vous seriez méfiée. Tirerez-vous profit de cette cuisante leçon ?

Je ne sais pas si Guy Chevrette a été irréprochable pendant toute sa carrière politique de 25 ans.

Ce que je sais toutefois et ce que je dis, c’est que le témoin Gilles Cloutier n’est pas crédible.
Ce que je sais aussi c’est que la Commission Charbonneau l’a traité comme si il était un témoin crédible à travers la procureure-chef Sonia Lebel.


Se posent alors un certain nombre de questions.
Qui sont ces avocats/avocates de la Commission Charbonneau ?
Sont-ils vraiment des incorruptibles à la recherche de la vérité et de l’honnêteté à rétablir dans le monde de la construction ?
Sont-elles sans aucune appartenance politique et totalement exemptes de partisanerie politique ?


Ça m’étonnerait. A propos des affabulations de Gilles Cloutier, il aurait été facile à la Commission de vérifier ses histoires. C’est la crédibilité de la Commission qui est en cause, de ses éventuelles recommandations, sinon de son rapport au complet. C’est ça qui est grave. »

Est-ce qu’il y a quelqu’un qui pense encore que la commission Charest-Charbonneau cherche à nuire aux Libéraux ? Demandez-vous sous quelle influence ont été nommés les membres de la Commission à commencer par France Charbonneau elle-même ? Ils ont été nommés sous l’influence de Jean Charest, ça veut tout dire. Peut-on s’étonner qu’il y ait deux poids deux mesures dans la façon de traiter les témoins ? Par exemple, après avoir été mis en cause, André Morrow, le mari de Liza Frulla qui a un vaste réseau puisqu’on la voit partout, a pu rapidement s’expliquer tandis qu’on a fait poireauter Guy Chevrette pendant un an lui qui avait été attaqué faussement par le mythomane Gilles Cloutier, le faiseur d’élections municipales clés en mains que Me Sonia Lebel a transformé en vedette de la Commission. Y a-t-il à se surprendre du biais franchement anti-syndical de la Commission ? Et de son hostilité à l'égard de la FTQ et de son peu de respect pour le Fonds de solidarité qui est une grande institution québécoise.

En terminant, la Commission Charbonneau a mis sur le même pied et dans le même sac le financement du Parti québécois et le financement du Parti libéral. Le financement du Parti québécois était surtout fait de dons de 200$ et plus: c'est du financement populaire. Quant au Parti libéral du Québec, pendant ses années de pouvoir de 2003 à 2012, la majorité des contributions est le maximum permis de 3,000$ et on sait que ces contributions sont le lieu privilégié du système des prête-noms. Ce que la commission a donné comme impression c'est que les deux principaux partis ont profité presqu’également du financement illégal. Or, c'est faux. C'est de la désinformation et les chiffres officiels du financement le prouvent.

Un politicologue est venu démontrer (sans que ça passe à la télévision) que le financement illégal a profité cinq fois plus au Parti libéral au pouvoir de 2003 à 2012. Espérons que dans son rapport final la Commission Charbonneau blâmera cinq fois plus fortement le Parti Libéral de Jean Charest. Ça serait bien le comble du ridicule et de l’absurdité que cela n’apparaisse pas dans le rapport final de la Commission. On comprend que les rédacteurs du rapport aient besoin de plus de temps : quand on a été nommé par des libéraux, c’est délicat d’attaquer des libéraux… et je dirais même plus : c’est très difficile sinon impossible.

Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
jeudi 05 février 2015
barberis@videotron.ca

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