LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : dimanche 16 août 2015 11:08

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Barberis-Gervais

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dimanche 16 août 2015

Denis Coderre: un  geste symbolique illégal, pourquoi ?
par Robert Barberis-Gervais

Denis Coderre, marteau-piqueur en mains, devant les caméras, a démoli, au parc «éco-naturel» de l'Anse-à-l'Orme, dans l'arrondissement Pierrefonds-Roxboro, une dalle de béton devant servir de base à l'installation de boîtes postales.

Dans une salle de spectacle ou dans un lieu public, quand un individu a un malaise ou s'évanouit, on demande: «Y a-t-il un médecin dans la salle?» Alors, je demande: «Y a-t-il un avocat dans la salle?»

Dans «La Presse», du vendredi le 14 août 2 015, sous la plume de Philippe Teisceira-Lessard, nous lisons: «Le maire de Montréal a défendu bec et ongles sa participation à la destruction d'une dalle de béton de Postes Canada, ce matin, plaidant qu'il s'agissait d'un geste politique et non d'un acte criminel. Denis Coderre ne regrette «pas du tout» d'avoir empoigné un marteau-piqueur pour pulvériser l'installation, hier, au parc de l'Anse-à-l'Orme, «même que j'étais très fier.» «C'était un geste politique, c'était un geste symbolique», a-t-il dit. «Le maire de Montréal est une institution, je représente l'ensemble des Montréalais.»

Or, si Postes Canada avait le droit de poser cette dalle de béton comme cela semble être le cas, le geste de Denis Coderre est illégal. Nous assistons donc au retour de la violence en politique. Cela nous fait penser aux felquistes qui ont fait sauter des boîtes postales à Westmount à partir de 1963. Les felquistes, comme Denis Coderre, disaient agir dans l'intérêt collectif pour justifier leurs gestes de violence. Faire sauter des boîtes postales dans Westmount, au coeur de l'establishment anglophone qui dominait et exploitait (selon eux) les Canadiens-français, c'était un geste politique à portée symbolique… et non un acte criminel, comme pour Denis Coderre, ex-ministre dans le gouvernement Trudeau qui a même osé répéter le «Just watch me» de son chef Trudeau avant de jouer du marteau-piqueur. Rappelons, pour les incultes en histoire, qu'avant d'envoyer l'armée au Québec pendant la Crise d'Octobre 1970 et avant d'emprisonner 500 militants syndicaux et militants indépendantistes comme Gaston Miron, Andrée Ferretti, Michel Chartrand, Gérald Godin etc., à un journaliste anglophone qui lui rappelait que tous les citoyens canadiens avaient encore des droits y compris les Québécois, Pierre Elliot Trudeau avait répondu «Just watch me» en s'attaquant à ceux qu'il appelait les «bleeding hearts » (les coeurs sensibles...). Alors ce n'est pas moi qui invite à penser au FLQ, c'est Denis Coderre lui-même.

Le geste de Denis Coderre était-il illégal? La Loi sur la Société canadienne des postes et ses règlements sont clairs: «Il est interdit d'enlever» toute installation «destiné[e] à la levée, à la distribution et à l'entreposage du courrier». Les infractions à la loi et aux règlements fédéraux sur les postes sont passibles d'une peine maximale de cinq ans de prison.

Postes Canada pouvait-elle installer sa dalle de béton au parc de l'Anse-à-l'Orme? La Loi sur la Société canadienne des postes et ses règlements sont clairs. Postes Canada peut installer «dans un lieu public, y compris une voie publique, tout récipient ou dispositif destiné à la levée, à la distribution et à l'entreposage du courrier». Cette disposition a priorité sur toute décision ou règlement municipal - ou provincial - parce que le service postal est de compétence fédérale. Selon un expert, «ce n'est pas permis d'entraver l'exercice du coeur d'une compétence».

Le droit de Postes Canada de s'installer dans tout lieu public est-il seulement théorique?
Non. En mai dernier, un juge de la Cour supérieure de l'Ontario a établi que la ville de Hamilton ne pouvait exiger de Postes Canada qu'elle se procure un permis municipal pour ériger ses boîtes postales communautaires en bordure de route. Le règlement qui prévoyait cette obligation est «sans effet aux boîtes postales communautaires installées par ou pour Postes Canada». Le juge a toutefois accordé beaucoup d'importance au fait que l'entreprise publique avait consulté la municipalité. La société d'État s'est ensuite réjouie de la décision, alors que Hamilton l'a portée en appel.

(Source, La Presse, Philippe Teisceira-Lessard, 14 août 2015)

Le geste qu'a posé le maire de Montréal est un acte criminel dit l'avocat. C'est un geste illégal. C'est de la désobéissance civile. Vous souvenez-vous quand on a entendu cette expression? C'est quand le militant étudiant Gabriel Nadeau-Dubois a recommandé la désobéissance civile devant la loi 78 de Jean Charest qui avait pour but de paralyser l'action étudiante.

Conclusion: pour Denis Coderre, quand on a de bonnes raisons, la violence politique se justifie. Ainsi donc les cols bleus qui ont mis l'hôtel de ville à l'envers n'avaient-ils pas de bonnes raisons de le faire?

On n'a pas fini d'examiner les conséquences des gestes «populistes» et illégaux posés par Denis Coderre. Notons que Postes Canada a priorité sur toute décision ou règlement municipal - ou provincial - parce que le service postal est de compétence fédérale. De quoi réfléchir sur les situations où la démocratie des villes du Québec ou la démocratie de la «province» de Québec passent après les volontés d'une société de la couronne. Denis Coderre serait-il en train de remettre en question le régime fédéral lui-même? Il ferait mieux de faire attention pour ne pas perdre en cours de route l'appui de sa base anglophone pour qui le Canada tel qu'il est et tel qu'il ne doit pas changer, c'est sacré. Denis Coderre est-il en train, par la force des choses, de devenir un nationaliste québécois?

Pas du tout me répondra-t-on. Pour cet ex-ministre libéral, tous les moyens sont bons pour nuire aux conservateurs. D'ailleurs, s'il y avait un avocat dans la salle, je lui demanderais comment Stephen Harper peut-il dire tous les jours que Mike Duffy a réclamé des sommes d'argent pour des dépenses qu'il n'a pas faites. N'est-ce pas l'objet d'un procès au criminel: que devient le sub judice?

p.s. Je n'avais pas vu la caricature de Garnotte dans Le Devoir du 14 août. Il faut croire que les grands esprits se rencontrent.


Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
dimanche 16 août 2015
barberis@videotron.ca

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