LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : vendredi 21 juin 2013 14:46

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NÉCROLOGIE

NOUS JOINDRE


Robert
Barberis-Gervais

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L'opinion exprimée dans le cadre de cette chronique, est celle de son auteur
et ne reflète pas nécessairement l'opinion, ni n'engage le SORELTRACY MAGAZINE.
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vendredi 21 juin 2013


A propos d'un discours soi-disant "non civilisé" et "hargneux" de Pauline Marois
Contestation de la réponse de Radio-Canada à une plainte

par Robert Barberis-Gervais

(Correspondance avec Radio-Canada)

M. Pierre Tourangeau ombudsman de Radio-Canada

M. Tourangeau,

Vous m’avez informé que si la réponse de Radio-Canada à une plainte que j’ai formulée ne me satisfaisait pas, je pouvais la contester en m’adressant à vous. C’est ce que je fais par la présente. Je suis en désaccord avec le porte-parole de Radio-Canada, M. André Dallaire.

En guise d’introduction, disons que la réponse de Radio-Canada à ma plainte me semble être une parfaite illustration de ce qu’écrit Michel Arsenault dans son article publié dans la revue Actualité : « Brigitte, Pauline même combat ? » sur la série danoise Borgen. Dans cette série politique, « il sera aussi beaucoup question de télévision celle qui (...) est plus vilaine qu’il n’y paraît. Elle ne viole jamais ouvertement les principes de déontologie. Non (il faut sauver les apparences !), elle se contente de les mettre à sa sauce. »

Au conseil national du Parti québécois du 11 mai 2013, la première ministre du Québec Pauline Marois a prononcé un discours où elle a attaqué le chef du Parti libéral Philippe Couillard. Le téléjournal a qualifié de hargneux un tel discours alors que, selon Martine Biron, on se serait attendu à un discours plus civilisé. J’ai été choqué par l’utilisation des mots "civilisé" et "avec hargne". Selon moi, c’est une forme de jugement éditorial qui n’a pas sa place au téléjournal qui est supposé donner de l’information objective. Pourquoi ne serait-il pas "civilisé" de critiquer le chef de l’opposition et son parti et pourquoi qualifier de "hargneux" un discours politique normal prononcé devant une assemblée partisane ? C’est donner une orientation négative à un reportage et c’est donner un sens qu’il n’a pas à un événement politique. La justification qu’en fait M. André Dallaire au nom de Radio-Canada ne m’a pas convaincu. Voici sa réponse à ma plainte.

Montréal, le 7 juin 2013

Monsieur Barberis-Gervais,

Nous avons pris connaissance de la plainte que vous avez adressée à l’ombudsman de Radio-Canada. Nous nous faisons un devoir d’y donner le suivi approprié.

Vous êtes d’avis que l’emploi par la journaliste Martine Biron de certains qualificatifs pour décrire le discours prononcé par la chef du Parti Québécois lors d’un conseil national de son parti n’était pas approprié. Vous jugez que l’emploi de ces descriptifs rompaient avec l’objectivité et impliquait un jugement de valeur sur le discours de madame Marois, bref, qu’il orientait la nouvelle de façon contraire à l‘éthique.

Il s’agit donc au fond, de déterminer si la journaliste a rapporté l’événement qu’elle couvrait avec exactitude et impartialité dans un reportage diffusé au Téléjournal de fin de soirée le 11 mai dernier. Vous écrivez : « Martine Biron prend la parole et dit : "Oui, et ceux qui pensaient Pascale que le ton serait plus civilisé avec l’arrivée du Parti québécois au pouvoir seront déçus. Pauline Marois s’en est pris de façon virulente avec hargne même aux Libéraux en les associant à la corruption." C’est contre ce passage du reportage que je porte plainte, j’y reviendrai. »

Par médias interposés, nous avons tous été témoins dans un passé pas si lointain, d’innombrables échanges acrimonieux entre madame Marois et monsieur Charest. Que dit donc la journaliste ? Que, gouvernement minoritaire oblige, ce n’est pas parce que Philippe Couillard a remplacé Jean Charest que Pauline Marois l’épargnera dans ses attaques et lui fera des politesses. C’est le sens ici du mot civilisé.

Si nous relisons les piques lancées par madame Marois dans son discours, si on en réécoute le ton surtout, on constate qu’il s’agit bien d’attaques fougueuses, virulentes contre un adversaire politique. Madame Marois est-elle hargneuse, c’est-à-dire acerbe, agressive, dans ses propos ? Réécoutons encore une fois les déclarations, elles parlent d’elles-mêmes si l’on peut dire. C’est un chef politique qui parle, qui s’exprime devant des partisans dans une assemblée politique, un contexte où les attaques frontales contre l’adversaire sont de mise, où l’absence de telles attaques lui serait même reprochée par des partisans. Ainsi va la politique. Si la journaliste avait rapporté que madame Marois avait mollement, voire poliment sermonné ses adversaires, aurait-elle été fidèle à la réalité ? À l’évidence, non.

Nous avons eu l’occasion, dans une correspondance précédente de vous indiquer que le journaliste n’est pas un relationniste. Sa tâche est de rapporter honnêtement et de façon impartiale les faits, mais aussi d’éclairer, d’expliquer ces faits, de donner le contexte d’un événement, d’une déclaration.

Dans ce cas-ci, nous jugeons que les propos ont été rapportés avec exactitude et mis en contexte de façon objective, c’est-à-dire fidèle au sujet du discours, à l’abrasion des propos et à l’intention qu’avait celle qui les a tenus.

Vous pouvez, si vous le jugez nécessaire, faire de nouveau appel à l’ombudsman. Le bureau de l’ombudsman est une instance d’appel indépendante (ombudsman niU radio-canada.ca). Recevez, monsieur Barberis-Gervais, nos salutations distinguées. André Dallaire Directeur, traitement des plaintes et affaires générales Information - Services français

Voici ma réplique.

Selon moi, la tentative de justification de l’affirmation qu’avec le Parti québécois au pouvoir on se serait attendu que "le ton serait plus civilisé" ne tient pas la route.

André Dallaire écrit : "Que dit donc la journaliste ? Que, gouvernement minoritaire oblige, ce n’est pas parce que Philippe Couillard a remplacé Jean Charest que Pauline Marois l’épargnera dans ses attaques et lui fera des politesses. C’est le sens ici du mot civilisé."

Cette entourloupette ne tient pas la route..

Comme l’écrit Michel Arsenault : « (…) la télévision ne viole jamais ouvertement les principes de déontologie. Non (il faut sauver les apparences !), elle se contente de les mettre à sa sauce. »

Considérer qu’une femme politique qui attaque un adversaire aurait pu être plus civilisée, c’est avoir une conception angélique de la politique. De même, considérer qu’une attaque virulente, c’est de la hargne, c’est déformer le sens de cette attaque. C’est le reproche que je fais au téléjournal du 11 mai 2013.

Martine Biron a dit :

"Oui, et ceux qui pensaient Pascale que le ton serait plus civilisé avec l’arrivée du Parti québécois au pouvoir seront déçus. Pauline Marois s’en est pris de façon virulente avec hargne même aux Libéraux en les associant à la corruption."

Voici ce que Martine Biron aurait dû dire :

"Oui, et ceux qui pensaient Pascale que le ton serait moins agressif avec l’arrivée au pouvoir du Parti québécois seront déçus. Pauline Marois s’en est pris de façon virulente aux Libéraux en les associant à la corruption."

Si Martine Biron s’était exprimée ainsi, je n’aurais pas porté plainte.

Voyons le sens des mots.

"Civilisé" a pour synonymes : cultivé, poli, policé. Le mot civilisation implique l’idée d’une société évoluée qui a développé un art de vivre dans l’harmonie et le savoir-vivre. Dire qu’un discours politique aurait pu être plus civilisé, c’est laisser entendre que ce discours manquait de savoir-vivre et de politesse. On se croirait dans un salon d’Outremont ma chère ou de Ste-Anne-de-Sorel où des libéraux prennent un verre de vin le petit doigt en l’air. C’est porter un jugement sur ce discours et un jugement négatif qui n’a pas sa place quand on fait de l’information.

Quant au mot "hargne", c’est encore pire. C’est très efficace pour discréditer un discours politique surtout un discours fait par une femme politique qui aurait manqué ainsi de raffinement et de civilité.

Voyons la définition du mot "hargne" : mauvaise humeur se traduisant par des propos acerbes, un comportement agressif, parfois même méchant ou haineux. "Hargneux" : Voir acariâtre, grincheux, querelleur, rageur. Une femme hargneuse.

Si d’associer le Parti libéral à de la corruption, c’est de la hargne, il faudrait que Radio-Canada sorte de sa tour d’ivoire. Le Parti libéral et la corruption, on va finir par en parler à la Commission Charbonneau.

Le téléjournal du 11 mai 2013, en utilisant les mots "civilisé" et "hargne" a orienté l’information et l’a mal orientée. C’est le sujet de ma plainte et je maintiens ma plainte.

Nous sommes assez grands pour former notre propre jugement sur les événements politiques. Ce serait un minimum de respect à montrer aux payeurs de taxes et d’impôts qui financent Radio-Canada et qui sont irrités par les petits qualificatifs que les rédacteurs mettent dans la bouche de Martine Biron ou de Céline Galipeau quand elles parlent de réaction timide du gouvernement Marois suite aux 37 arrestations de l’UPAC à Laval ou quand elles annoncent la nouvelle politique de redevances minières en la qualifiant de recul…comme l’opposition ou quand elles utilisent de façon péjorative les mots "civilisé" ou "avec hargne" pour discréditer un discours de la cheffe du Parti québécois.

En étant plus impartiale, la société Radio-Canada se comporterait de façon plus civilisée et serait moins hargneuse à l’égard du gouvernement Marois. Elle servirait alors beaucoup mieux les Canadiens et les Québécois qui ont droit à une information factuelle et objective non déformée par des jugements tendancieux, ce genre de jugements dont Radio-Canada a pris l’habitude quand il s’agit de parler du seul parti qui met en danger l’unité canadienne que la télévision d’Etat a pour but de défendre et de promouvoir, c’est d’ailleurs peut-être ça le problème.

Est-ce que cette mission de sauvegarder l’unité canadienne est conciliable avec une information impartiale et objective ? On peut en douter.

Salutations, M.Tourangeau.

p.s. Bonne fête Québec!  "Cela ne pourra pas toujours ne pas arriver." (Gaston Miron)

Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
vendredi 21 juin 2013
barberis@videotron.ca

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