« En passant... »

Parlons hockey, o.k.? 

– Jouer chacun dans sa cour avec ses «bebelles» 

            D'entrée, une mise au point s'impose : d'un strict point de vue sémantique, la Ligue nationale de hockey est une incongruité patente, pour ne pas dire une «patente» incongrue. En effet, même à l'époque glorieuse où elle ne se composait que de six équipes, la Ligue en question menait ses activités dans deux pays (les mêmes où elle «sévit» aujourd'hui, d'ailleurs); alors, pour l'aspect «national», il faudra repasser! 

            Le hockey «à la Bettman» est voué à une mort certaine. Comment composer avec, d'une part, l'appétit insatiable des joueurs, aiguisé par un Goodenow aux yeux de qui aucun salaire n'est jamais good enough, et, d'autre part, l'incurie des propriétaires, dont bon nombre refusent tout simplement de voir le fond de leur portefeuille et sont toujours enclins à puiser à pleines mains dans celui d'autrui? Il y a un choix à faire, cornélien peut-être, mais nécessaire : rester et continuer de voir «nos» équipes canadiennes mourir à petit feu, «oubedon» partir au plus vite avec l'espoir de faire revivre notre hockey à l'intérieur de nos seules frontières. 

Ouais! repartir à zéro, mais avec autre chose que des «clones» LNHiens sur la glace ainsi que dans les bureaux vitrés et climatisés, histoire d'éviter la «reproduction» des mêmes erreurs, t'sais veux dire! 

Il n'y a plus rien à espérer d'un hockey qui se joue majoritairement dans un pays où ce sport est, au mieux, perçu comme une «curiosité sur lames», et, au pis, assimilé à une variante de la lutte «arrangée» offerte ad nauseam par la WWF. Au chapitre de la popularité auprès de la gent «sportive» assise amerloque, il est même permis de croire que le hockey traîne toujours la patte derrière les «derbys de démolition» et le bowling. Lamentable! 

Rapatrions «notre» hockey! Revenons chez nous avec nos «bebelles», retrouvons notre philosophie du jeu, fonctionnons selon nos moyens… et laissons-leur les séances de décapitation et le défonçage de clôtures! Il ne s'agirait même pas de revoir le livre des règlements, uniquement de l'appliquer à la lettre! Des matches arbitrés «égal» d'un bout à l'autre, ça devrait pouvoir se faire, non?! 

C'est sûr, il n'est jamais facile ni tentant de sauter à bas d'un train fou, même et surtout lorsqu'il s'agit d'un convoi rutilant dont la locomotive s'est emballée sur la voie sans issue des profits et pertes mirobolants calculés en dollars américains[1]. Toutefois, ne vaut-il pas mieux se relever avec des bleus que de finir par crever les mains vides, aplati contre un mur? 

Contrairement à M. Réjean Tremblay, chroniqueur-vedette à La Presse, je crois dans les chances de réussite d'une ligue de hockey pancanadienne, « d'un Pacifique à l'autre », comme aurait dit ce bon vieux Claude Ruel, «Piton» pour les intimes. Ne l'oublions pas, le hockey n'est pas le football : au nord du 45e parallèle, il jouit d'un pouvoir d'attraction beaucoup plus fort que ce dernier!  

En terminant, s'il importe à tout prix de nous démarquer du «produit» américain, que ne procéderions-nous pas à l'«olympisation[2]» des patinoires de notre toute nouvelle ligue, vraiment «nationale», celle-là? Après tout, nous avons certes tout intérêt à nous rapprocher du jeu joué à l'européenne, plutôt que de rester attachés, comme par un atavisme malsain, à ce qu'il convient d'appeler l'antihockey érigé en système. 

Jean-Paul Lanouette
jplanouette@sympatico.ca

[1] Curieusement, la version papier du dollar a les reins beaucoup plus solides que notre pourtant métallique huard.

[2] Par «olympisation», j'entends adoption des dimensions olympiques. Pour réaliser cette opération, il suffirait de sacrifier quelques rangées de sièges, ce qui nous permettrait de repousser les bandes des quatre côtés.

 

mardi 14 janvier 2003