LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : mercredi 28 août 2013 10:28

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mercredi 28 août 2013

« Joey va te faire un prix »

Événement presque passé sous le radar à Sorel-Tarcy (le mien du moins) : Jacob fêtait ses 35 ans. En fait, c’est le hasard qui m’a informé de cet anniversaire. À Sorel-Tracy, nous qui cherchons à renouer avec une certaine fierté collective, avons-nous raté une occasion de souligner un succès ayant des origines locales? 

Toujours est-il que Jacob, c’est l’un des fleurons du commerce de détail au Québec et au Canada, dont le premier magasin a été ouvert ici à Sorel-Tracy vers 1960. C’est « plus de 100 magasins et 1 500 employés à travers le Canada. » Les quelques difficultés financières et commerciales en 2009 et 2010 de ce détaillant, ne doivent en rien assombrir ce moment clé dans la vie de ce « success story », qui va maintenant de nouveau vers l’avant. 

Le modèle d’affaires actuel de Jacob et son rayonnement trouvent leur origine parmi nous en 1977, sous la gouverne de Joey Basmaji et de sa conjointe Odette Bolduc, des gens d’ici. J’avais alors 18 ans et j’entrais au CEGEP de St-Hyacinthe, campus Bourgchemin situé à Sorel

Voici donc, basé sur de lointains souvenirs, le récit de ma seule rencontre avec Joey Basmaji, vers 1974-1975. 

15-16 ans, c’est ma période fin ado-gars mal dégrossi, un peu « tocson », quelques boutons, assaillit par un trop-plein constant d’hormones, tiraillé entre les « sports », mais en pleine migration vers les « filles », ma première copine sérieuse et les « événements liquides ». Une époque d’innocence où je n’avais aucune question, que des réponses… monosyllabiques. Étudiant moyen à Bernard-Gariépy, peu intéressé par les études, j’y fonctionnais sur mon talent naturel, effort minimum selon deux critères : « Ça passe t’su? Chu t’su dans la moyenne des notes de ma gang? ». Mon univers, c’était Tracy, entre l’aréna Aussant et le Centre culturel. Sorel, de l’autre côté du Richelieu, c’était un autre monde que l’on fréquentait peu

1974-75, c’est l’arrivée des « jeans » dans ma vie; devenu un vêtement mythique. C’est l’époque où son achat était comme un rite de passage. À ce titre, la salle des étudiants de Bernard-Gariépy, là où l’on « vèdgeait » dans l’attente de la Cloche, était le lieu de toutes les observations vestimentaires. Chaque nouveau « jeans » était l’objet de regards plein de convoitise, d’envie et de jalousie, surtout entre filles.  

C’est là pour la première fois, que j’ai entendu parler de « Joey » et de « Jacob ». D’ailleurs, tout le monde semblait connaître ce magasin de l’élite vestimentaire et adolescente, sauf les « tarlas boutonneux » dans mon genre. 

Là vous me reconnaîtrez immédiatement. Oui pour être à la mode, mais j’étais surtout préoccupé par le prix de la chose : « Combien ça coûte un jeans? » Et là, les réponses étaient opaques. Personne ne donnait la même, comme un secret d’alcôve d’une connivence mystérieuse avec le Saint-Graal de Sorel. Tous répétaient presque en murmurant, comme si c’était le « deal » du siècle pour privilégiés : « Joey m’a fait un prix ». En bout de piste, tous avaient la même conclusion, comme s’il s’agissait d’un mot de passe secret : « Joey va te faire un prix ». 

Me voilà donc chez Jacob un samedi après-midi, magasin d’origine, surchargé de vêtements, achalandage soviétique un jour d’arrivage, localisé à l’époque sur la rue Augusta, à la hauteur de l’actuel Pedro Bar. Les filles qui y travaillaient, les plus belles du monde, des êtres inaccessibles de mon âge, « full » conscientes de leur statut social privilégié au-dessus du commun des mortels, lié au fait de travailler chez « Jacob ». Moi, petit gros frisé rondouillet devant ces déesses, je me sentais encore plus petit, plus frisé et plus gros, surtout en arrivant là avec ma plus belle paire de culottes en toile usée. Je me souviens d’avoir rapetissé en entrant chez « Jacob ». Ça adonnait bien, la première paire de « jeans » essayée était trois points trop petits.  

« Elles te font bien » de me dire la divine jeune beauté blonde vendeuse qui ne m’avait accordé aucun regard. Une chance qu’il y avait dans la place, une adulte pour gérer l’ensemble, une dame d’allure maternelle réconfortante. Sinon, c’est le GI Joe du fond de mon garde-robe en aurait hérité. Finalement, après quelques essais, je portais la paire qui convenait. J’étais devenu un « king ». Mais pour ma reine du magasin, la Vénus blonde à l’œil hautain, je n’étais toujours qu’un idiot de Bernard-Gariépy. 

Le prix? Je ne m’en souviens plus. 24 $, c’est le montant que j’ai en tête. Une fortune à l’époque pour une paire « d’overall » comme le disait ma mère. Mais je me souviens surtout de ce moment mystérieux, mystique de mon expérience d’achat. Ma beauté vendeuse de sa voix de miel avait dit sans même me regarder : « Joey va te faire un prix ». Enfin, c’était mon tour. Je serais initié. Ouf, j’attendais et le cœur me débattais. Si c’était trop cher, je faisais quoi? Je ne voulais pas me couvrir de honte. Si même Joey ne voulait pas me vendre à moi, un péquenot de Tracy? On a attendu quelques minutes, moi et la jeune déesse statuesque, silencieuse et… aveugle. 

Il était là, Joey, sorti de nulle part, entre deux « rack » comme s’il m’espionnait, pour me faire un prix, le Prix, mon Prix. Cheveux noirs, l’œil noir, peut-être habillé en noir, c’est floue, le nez un peu effilé, il m’a regardé. Il a vérifié le prix sur l’étiquette comme si je lui arrachais le cœur, technique de négociateur devant l’amateur, m’a de nouveau regardé comme si je lui faisais perdre son temps et sentencieux, il m’a dit : « 24 $, mon dernier prix ». Alléluia, le Nirvana, Joey venait de me faire un Prix à moi, humble ado. Prix qui une fois prononcé, signifiait que ma déesse vendeuse me « flushait » automatiquement, toujours sans un regard. 

Mais moi, Jocelyn Daneau, le lundi matin, je pourrais dire comme tout le monde : « Joey m’a fait un prix ». Pour nous apercevoir que finalement, nous avions presque tous le même prix.  

Merci Joey pour ce prix réduit, bonifié de circonstance sur l’étiquette. Prix que la dame de la caisse savait d’instinct, tant elle connaissait Joey et sa technique de vente. 

Mais surtout, merci Joey Basmaji pour cette leçon de négociation.  

BRAVO JACOB !!! 

Jocelyn Daneau
Courriel : jocelyndaneau@gmail.com
Blogue - Sorel-Tracy dans l’univers : http://wp.me/2JVSB

Saurel-O-Mètre électoral 2013 - SOME 2013
Explications : http://wp.me/P2JVSB-2S

Grille d’analyse (résultats) du SOME 2013 – Version 5 (3 août 2013)
Voir :
http://wp.me/a2JVSB-9Q

Jacob : chic défilé pour le 35e anniversaire
Source : http://www.journaldemontreal.com/2013/08/01/jacob-chic-defile-pour-le-35e-anniversaire

Photos : Jacob s'offre un défilé chic
http://fr.canoe.ca/artdevivre/mode-beaute/galeries_photos/20130801234028_jacobfmd/fullscreen.html

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