Le changement de nom de l'Hôtel-Dieu est
dans l'air mais ne fait pas l'unanimité
Louise Grégoire-Racicot - Journal Les 2
Rives - 24 avril 2007
Les amants de l'histoire sont bousculés ces temps-ci. Après la
perspective de voir un parc d'enfants installé au carré Royal
- ce qui déplaît à plusieurs - voilà que d'autres craignent
que le changement de nom de l'Hôtel-Dieu viennent rayer de la
carte une partie de l'histoire de l'hôpital sorelois qui porte
un nom qui, depuis longtemps, identifie ce type de bâtisse et
les soins qu'on y
dispense (voir texte de Gilles Labelle en page 39).
Et pourtant, ils ont raison de craindre cette éventualité. Une
entrevue téléphonique avec le président du conseil
d'administration du Centre de santé et services sociaux de
Sorel-Tracy, André Lussier (à droite), le confirme.
Mais, prévient-il d'entrée de jeu, la décision n'est pas
encore complètement arrêtée même si déjà des noms sont sur la
table pour renommer l'ensemble des bâtisses constituant le
réseau de santé bas-richelois.
Ainsi, dit-il, il y a fort à penser que le nom CSSS de
Sorel-Tracy disparaîtra au profit du CSSS Pierre de Saurel. Un
nom beaucoup plus près de l'histoire de la région qu'il
dessert, la seigneurie de M. de Saurel, a dit M. Lussier.
D'ailleurs, voilà bien ce qui anime un comité élargi mandaté
qui travaille à cette question et dont il fait partie, a-t-il
rappelé.
"Il appartient au conseil d'administration de trancher et il
le fera", assure-t-il, rappelant que les élus qui y siègent
sont là bénévolement et pour décider. "Si leur décision ne
plaît pas, d'autres devront se présenter lors du prochain
scrutin et nous battre", a-t-il rajouté.
Il y a un moment, a-t-il fait valoir que ce sujet est sur la
table. D'abord parce que le ministère de la Santé a demandé de
bien identifier dans leur titre la vocation des divers
établissements. "Ainsi nous devions changer les noms de
l'Hôpital général qui n'en n'est pas un et du Foyer Richelieu.
Les deux centres en sont d'hébergement et doivent être
identifiés comme tels. Devant donc leur trouver un nouveau
nom, nous avons choisi la cohésion et cherché dans notre
histoire des noms de personnes qui conviendraient parmi les
divers intervenants qui y ont oeuvré: médecins,
bénévoles, infirmières et employés. La société historique nous
a fourni une liste de noms parmi lesquels nous en avons retenu
trois. Mais comme leur famille n'a pas encore été consultée,
il est trop tôt pour les divulguer. De plus dans le cas de l'Hôtel-Dieu,
cette questions doit aussi être discutée avec les religieuses
qui en ont assuré la gouverne pendant de nombreuses années.
Aussi, on ne prendra pas de décision à notre prochaine
réunion."
Mais, reconnaît-il, retirer le nom d'Hôtel-Dieu ne répond pas
à des préoccupations d'accommodement raisonnable ou de
laïcisation de l'institution. "On tient plutôt à donner à
chaque institution un caractère plus humain en rappelant des
personnes qui ont contribué à ce qu'elles existent et
dispensent de bons soins.
De fait , une seule bâtisse garderait son nom pour le moment:
Le Centre d'hébergement de Tracy. D'abord parce qu'il
identifie bien sa vocation et le secteur où il est implanté
mais aussi parce qu'on ne connaît pas encore le sort qu'on lui
réserve. Il y aura toujours lieu de repenser son nom si on
continue de l'opérer, a dit M. Lussier
Des opposants au projet
Pour Monique Lafrenière, une infirmière à la retraite et
ex-membre du c.a. de l'Hôtel-Dieu, il est impensable d'en
changer le nom. Aussitôt qu'elle en a appris la possibilité,
elle a alerté tous ceux qu'elle croyait que cette question
intéresserait, histoire qu'ils s'inscrivent en faux contre
cette décision. "Pour moi, Hôtel-Dieu a cette résonance
certaine d'établissement de santé. Que l'on change les autres
noms, ça me va. Mais qu'on ne touche surtout pas à celui de
l'Hôtel-Dieu. Je me suis informée et la seule chose qui tient,
c'est qu'on ne peut pas parler d'hôpital Hôtel-Dieu. Ce sait
un pléonasme. Mais je crois que Hôtel-Dieu de Sorel, comme on
le dit souvent, identifie fort bien la bâtisse, les services
qu'on y dispense et le secteur où il se trouve. Je crois aussi
que l'on doit conserver ce nom par respect pour les
religieuses qui l'ont fondé. J'invite tous les gens concernés
par cette question à venir questionner le c.a. à son assemblée
de mercredi prochain sur la pertinence de cette démarche.
Quant à moi, je ne comprends absolument pas pourquoi je dois
me battre pour cela! Quant à savoir quel nom de médecin doit
être retenu pour renommer l'Hôtel-Dieu - il y en a plus d'un
et je ne vois pas pourquoi celui du dr Lamonde, dont on parle
beaucoup, serait celui qui primerait. Plusieurs autres
médecins ont aussi largement contribué à l'histoire de cet
hôpital"
Mme Lafrenière a reconnu faire des pieds et des mains pour que
le nom demeure. Elle a interpellé les membres du c.a. ainsi
que d'autres personnes influentes, dit-elle, espérant trouver
chez elles un appui indéfectible. Mais vendredi, elle n'était
pas certaine encore de l'impact de sa démarche. "D'où
l'importance de faire valoir différents points de vue au c.a.
avant qu'il ne tranche", a-t-elle conclu.
Porte-parole du CSSS de Sorel-Tracy, Daniel Vincent a reconnu
que plusieurs personnes avaient déjà pris la peine de
commenter cette affaire.
Un lecteur, Jean Rajotte, aussi ancien professeur d'histoire,
a fait parvenir, la semaine dernière, une lettre manifestant
sa dissidence à ce changement de nom. Il écrivait: ""Depuis sa
fondation, à la fin des années 40, cet établissement de soins
publics et d'urgence a toujours été connu sous ce nom. Chaque
ville importante du Québec a son hôpital de l'Hôtel-Dieu...La
bâtisse et son nom font partie de notre vie, de notre décor,
de notre patrimoine. Elle est comme un phare qui nous
sécurise. Tous les gens de la région s'identifient vocablement
à ce nom. Et que dire du nom de l'avenue de l'Hôtel-Dieu qui
n'aura plus son sens ?"
Il faut aussi savoir, complète-t-il, que dans le secteur de la
rue de Ramezay, dans un nouveau quartier domiciliaire, une rue
porte déjà le nom de Robert Lamonde. "Si nous parlons en
termes hospitalier", rajoute-t-il, " où est l'urgence et la
nécessité de procéder à une telle chirurgie nominative?" |
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