vendredi 21 novembre 2014
Austérité et
programmes sociaux
Par
Jean-Pierre Bergeron
Monsieur Philippe
Couillard,
Premier ministre du Québec,
Assemblée Nationale du Québec,
Hôtel du Parlement (Québec)
G1A 1A3
Monsieur le premier ministre.
Je joins ma voix personnelle aux
nombreuses personnes issues du
milieu communautaire, politique,
socioéconomique et autres de ma
région, qui élèvent la leur
devant votre croisade portant le
drapeau de l’austérité.
Je suis maintenant dans la
soixantième avancée. J’ai connu
la crise du pétrole début des
années soixante-et-dix et
ensuite une première crise
financière début des années `80.
Employé à l’époque à Marine
Industries, fleuron de renommée
internationale de notre économie
locale, j’ai eu recours dans un
premier temps aux divers
programmes fédéraux de maintient
ou de retour à l’emploi, et à
l’aide sociale.
Pour ce qui est des programmes
fédéraux de l’époque, j’ai
adhéré à la majorité de ceux-ci
: PDE (programme de
développement à l’emploi);
article 28; article 32….Bref.
Certains de ces programmes
d’employabilité allongeaient mes
prestations de chômage; les
bonifiaient; ou me permettaient
un renouvellement de demande. Le
peu d’Aide sociale, qui en
dernier recours j’ai demandé, et
dont les règles étaient
certainement moins rigides
qu’aujourd’hui, m’a permise
d’être colocataire sans trop de
pénalités.
Finalement, ces programmes
sociaux et leurs souplesses,
m’ont permis de participer à
diverses initiatives municipales
et communautaires,
principalement comme Agent de
développement, il y va de soi.
La majorité de ces projets
existent toujours. Et je ne suis
certainement pas le seul à avoir
profité de ces opportunités. Fin
des années `80, je suis de
retour au secteur privé, grâce à
une formation comme machiniste.
Expériences antérieures ayant
attisées ma curiosité, je décide
de m’inscrire à l’université et
ce, tout en conservant mon
nouvel emploi de machiniste.
Surprise !!! Au début de la
quarantaine et avec une onzième
secondaire comme élève moyen
difficilement réussie, issu
d’une famille modeste, je suis
accepté à l’université du
peuple, l’UQAM, suite à ces
expériences de travail cumulées
via…ces programmes sociaux
adaptés à ma réalité. Finalement
j’ai obtenu un Bac.
Quelques années plus tard, je
m’oriente finalement en milieu
social pour ne pas dire
communautaire : sécurité
alimentaire; réinsertion
socioprofessionnelle de jeunes
par l’entremise d’une entreprise
d’économie sociale; travailleur
de rue; insertion sociale de
personnes judiciarisées; mise
sur pied d’organismes citoyen;
défense des droits des personnes
locataires; etc. J’ai donc
décidé de…redonner au suivant.
Lors des divers soubresauts
économiques évoqués
précédemment, je n’ai jamais
assisté à des coupures dans les
programmes sociaux. Au
contraire, ceux-ci m’ont permis
et me permettent toujours de
contribuer économiquement et
socialement à aider des
personnes à s’intégrer ou se
maintenir actif socialement et
professionnellement.
Si votre mémoire est toujours
intacte, vous savez que la
région de Sorel-Tracy à été
lourdement affectée par ces
soubresauts économiques, avec
son lot de catastrophes sociales
et…humaines. Mais les citoyens
et citoyennes de Sorel-Tracy se
sont repris en main. J’avais
alors assisté à une montée en
force de nombreux organismes
d’aide à l’emploi et
communautaires d’entraide et de
support. Ont mis l’épaule à la
roue, l’ensemble des acteurs
conscients de nos particularités
régionales et prêts à redémarrer
l’emploi et l’économie. Durant
cette période de serrement de
ceinture on s’est aussi serrer
les coudes. Cet effort collectif
se poursuit toujours…pour la
création de vos 250,000 emplois
Maintenant bien ancrés,
l’ensemble de ces acteurs et
organismes répondent toujours
activement aux besoins de notre
collectivité, dans un
environnement économique
toujours précaire. Ils
remplacent les divers programmes
fédéraux, entre-autre, qui
maintenant tous passés à la
moulinette, m’ont permis le
cheminement professionnel et
social que j’ai réalisé. Je
souhaite ardemment que ceux et
celles qui désirent prendre la
relève, bénéficient tout comme
moi, des outils locaux qui leur
permettront de prendre cette
relève.
Dans le cas de certains
organismes communautaires et du
CJE; du CLD; et du CLE… qui ne
sait plus où donner de la tête,
pour ne nommer que ceux-ci, s’y
attaquer de front, comme vous
semblez vouloir le faire, c’est
s’attaquer à certains maillons
essentiels qui participent à
nous maintenir au vent d’une mer
économiquement agitée, en plus
de heurter de plein front notre
tissu social. Et je crois qu’il
en est de même pour plusieurs
régions du Québec.
Je me permets de vous souligner
que votre ¨New deal¨ est tout à
fait inacceptable. De plus, je
considère que c’est de très
mauvaise éthique ou déontologie,
que de manquer de respect envers
les personnes bénévoles ou
rémunérées qui ont maintenue ce
tissu social, et les personnes
aidées que vous vous devez de
représenter en tant qu`élu.
Je vous invite personnellement à
sortir de votre métropolisme et
faire un tour dans ma région et
plus précisément à Sorel-Tracy
et ce, discrètement et sans
tambour ni trompette évidemment.
Je vous expliquerai plus en
profondeur mon cheminement en
plus de vous faire visiter
plusieurs organismes et
rencontrer les divers acteurs
impliqués pour, qu’en
face-à-face, notre réalité et
notre quotidien vous soient
révélés. À moins que vos frais
de déplacements, soient eux
aussi sujets à vos mesures
d’austérité. Ce qui serait pour
moi une piètre excuse.
À l’aube de célébrer notre
375ème anniversaire comme
quatrième ville du Canada, votre
croisade pour l’austérité me
semble être de très mauvaise
augure pour le futur de notre
collectivité.
Veuillez recevoir, Monsieur le
premier ministre, mes
salutations comme citoyen
préoccupé mais toujours
impliqué.
Jean-Pierre Bergeron
Psychosociologue
Sorel-Tracy
P.s.: La redondance du verbe
permettre est toute à fait
consciente.
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