« En passant... » --- Textes de Jean-Paul Lanouette

Deux au prix de… deux : qui dit pis?

 Du «national» servi mur-à-mur 

            Heureusement qu'il n'est pas assorti d'armes de destruction massive, celui-là, sinon notre «nation» (laquelle au juste… : Canada ou Québec?) eût été décimée en moins de deux. Mais qui ça, il? Le ridicule, c't'affaire, qui d'autre?... oups! quoi d'autre? 

Deux capitales nationales au prix de... deux!

            Ouais! le ridicule… Ce n'est point là, à proprement parler, le sujet du présent billet, mais la situation, ou plutôt l'état de fait brièvement exposé dans les lignes qui suivent en constitue une par trop brillante illustration, de ce fameux ridicule qui, faut-il le rappeler, ne fait passer personne de vie à trépas[1]

            Dites, vous le saviez, vous, que, en ces temps marqués au coin de la générosité verbale, nous «jouissons» de deux Commissions de la capitale nationale? D'abord celle du fédéral (au niveau national), société d'État qui a vu le jour en 1959 à Ottawa, puis celle du Québec (au niveau… provincial ou «national»?!?), créée en 1995, après que l'Assemblée… nationale eut adopté la loi nécessaire. Au fait, à bien y penser, qui dit deux commissions de la capitale nationale dit a fortiori deux capitales nationales, non? Un peu «fourrant» pour le citoyen ordinaire, ça, et encore plus pour le touriste, fût-il moyennement informé, me semb' entéka! 

            Qu'il soit Canadien «à l'os» ou Québécois «d'abord», voire séparatiste invétéré, qu'il soit un partisan aveugle ou qu'il se dise tout à fait indifférent, préférant même se proclamer apolitique pur et dur, tout bipède pensant doué d'un minimum de logique ne manquera pas de mesurer l'ampleur de la bêtise entourant le mot à double emploi qu'est national

            Trouvez-moi un seul autre pays sur la «boule» où l'on puisse, à une semaine d'intervalle, célébrer deux fois «sa» fête nationale, sans que cela soit la même, dans une capitale nationale… qui ne soit pas la même non plus. Mêlant, vous dites? Mets-en, Armand! 

Du phantasme à la réalité 

            À force de ne plus vouloir être «provincial», terme perçu comme rabaissant et, sinon avilissant, du moins «vassalisant», on a décidé un beau jour d'accoler systématiquement l'épithète moins péjorative de national à tout ce qui se rapporte au Québec, à tout ce qui se veut ou se dit du Québec. Y'a juste un problème : la place est déjà occupée –  je veux dire : le mot s'applique encore à une réalité qui, pour l'instant, est la nôtre, que nous le voulions ou pas! Tant que le Québec restera province au sein du pays Canada, seul ce dernier sera fondé à se donner du national gros comme le bras. Désolé, mais c'est – ou ça devrait être – comme ça. Dans'vie, faut s'assumer tel que l'on est, dans le rôle qui nous est dévolu par l'Histoire et que nous voulons bien nous donner collectivement par élections, référendum ou autrement! Or, pour l'heure, n'en déplaise aux… nationalistes à tout crin, national devrait s'écrire exclusivement «à la canadienne». S'autoproclamer national, c'est pas le tout, ça; faut d'abord et surtout le devenir «en bon uniforme», comme dirait l'autre. D'ici là, cessons donc de jouer à la grenouille prétentieuse qui veut se faire bœuf : vivons avec l'étiquette «provinciale» que nous méritons, la seule à qualifier fidèlement notre identité actuelle au sein de la confédération! 

            Simple question de logique et de clarté, légitime souci de se faire comprendre et d'être compris. 

En passant, on n'est pas les seuls… 

            Décidément, on a d'la misère avec le mot «national» en Amérique du Nord. En effet, et cela pourra en consoler certains, il n'y a pas qu'au Québec que celui-ci fasse problème. Car il faut préciser que, d'un strict point de vue sémantique, la Ligue nationale de hockey soi-même est une incongruité patente, pour ne pas dire une «patente» incongrue. 

En effet, même à l'époque glorieuse où elle ne se composait que de six équipes, la Ligue en question menait ses activités dans deux pays – les mêmes où elle «sévit» aujourd'hui, d'ailleurs –, dans deux pays, disais-je donc, voisins peut-être, mais fort distincts, ô combien! l'un de l'autre. Alors, pour l'aspect purement «national», il faudra repasser!  

Côté logique, ce n'est guère plus reluisant dans le monde du baseball! Pensons seulement aux Blue Jays de Toronto : ne font-ils pas partie de la Ligue américaine? Et n'oublions surtout pas «nos» Expos à temps partagé, seule équipe «canadienne» à évoluer, que dis-je? à survivre (pour combien de temps encore?) dans une ligue qui, elle aussi, persiste à se qualifier de… nationale? Y'a pas à dire : on n'en sort pas! 

Oui ou non? 

            National, mot à deux faces pour peuple à deux faces. Il ne s'agit pas d'un jugement, mais d'un constat. Désolant? Oui et non, pour répondre en Québécois

Jean-Paul Lanouette
jplanouette@sympatico.ca

[1] En effet, c'est connu, le ridicule n'est pas censé tuer, du moins en principe.

 

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