Courir 
												sous les portes de Brandebourg 
												 
												Je m’étais inscrit mais sans 
												vraiment me faire d’illusions. 
												Habituellement, je ne suis pas 
												tellement chanceux pour les 
												tirages au sort. Quand on tire 
												les billets d’un chapeau, il y a 
												de fortes chances pour que le 
												ticket qui indique la grandeur 
												du chapeau soit sélectionné 
												avant celui sur lequel est 
												indiqué mon nom ! Alors, ça vous 
												donne une p’tite idée !  
												 
												Quand j’ai ouvert le courriel il 
												y a quelques jours, tout était 
												écrit en allemand. Impossible à 
												comprendre. Nerveux, j’ai mis 
												quelques secondes avant de 
												m’apercevoir qu’un peu plus bas, 
												la version anglophone suivait. 
												 
												Je n’en croyais pas mes yeux. 
												Mais voyons dont ! Mon cœur a 
												pivoté sur lui-même. Depuis 
												quelques jours, je vis sur un 
												nuage. On dirait que je n’arrive 
												pas à réaliser ce qui m’arrive. 
												Berlin, je voyais ça uniquement 
												dans mes rêves…et encore moins 
												le marathon. 
												 
												Je me considère très chanceux 
												car comme celui de New York, on 
												doit être opportuniste pour 
												obtenir son laissez-passer. 
												Seulement 50,000 coureurs sont 
												choisis. Cela peut paraître 
												énormes mais tout comme à New 
												York, les demandes proviennent 
												de partout sur la planète et 
												dépassent facilement les 100,000 
												inscriptions pour la loterie. 
												 
												Berlin fait partie des cinq 
												marathons majeurs au monde. Je 
												vais vous avouer que cette ville 
												m’a toujours fasciné par son 
												histoire unique. Vous savez très 
												bien ce dont je veux faire 
												allusion. J’ai toujours voulu me 
												tremper dans ce passé pas 
												tellement rose pour cette 
												population qui aujourd’hui, n’a 
												pas le choix d’admettre et qui 
												cherche par tous les moyens 
												d’oublier.  
												 
												Le marathon de Berlin sera 
												présenté le 27 septembre 2015, 
												soit la même journée que le 
												marathon de Montréal. J’en serai 
												à mon 2e 42km en Europe après 
												celui de Paris en avril 2009. 
												Pas évident de s’ajuster à 
												courir un marathon après avoir 
												vécu un décalage horaire. Les 
												voyages vers l’Europe se 
												déroulent pour la plupart durant 
												la nuit et lorsque vous déposez 
												le pied à l’arrivée, disons que 
												les yeux et le cerveau sont 
												durement éprouvés. 
												 
												Bien entendu, je profiterai de 
												cette expérience pour visiter 
												cette magnifique ville. À 
												l’horaire du périple, il faut 
												inscrire le marathon au début du 
												séjour afin de se donner le plus 
												de chance possible d’éviter un 
												surplus de fatigue. 
												 
												Je croyais bien que les deux 
												dernières années revêtaient un 
												aspect très important pour moi 
												avec l’accomplissement de 
												plusieurs marathons. Toutefois, 
												2015 aura un cachet particulier. 
												Des présences à Boston en avril 
												et Berlin en septembre, deux 
												courses surprises que je 
												n’aurais jamais cru courir 
												éventuellement, mettront du 
												piquant. 
												 
												Qui plus est, mon grand ami 
												Brian Brochet, que j’ai 
												accompagné lors de son premier 
												marathon à Ottawa en mai 
												dernier, sera du voyage car lui 
												aussi a eu le privilège d’être 
												sélectionné pour l’épreuve. Il 
												devra cependant guérir une 
												vilaine blessure à un pied. On 
												vient à peine de le libérer d’un 
												plâtre.  
												 
												Dès que j’ai appris la nouvelle, 
												je l’ai annoncée à ma mère. Âgée 
												de 84 ans, elle était vraiment 
												heureuse pour moi. « J’espère 
												que je serai encore ici pour le 
												vivre avec toi. Je suis 
												contente, c’est vraiment beau. » 
												 
												Je me suis dit que je devais 
												être fier de vivre le moment et 
												de l’apprécier au plus haut 
												point.  
												 
												Malgré la fragilité qu’elle 
												démontre, je lui ai répondu : « 
												Tu seras là maman et je 
												déposerai ma médaille dans ton 
												cou à mon retour. » Puis, j’ai 
												compris. Je me suis rappelé 
												qu’elle avait vu l’état physique 
												de son père démoli au retour du 
												champ de bataille durant la 
												guerre dont elle m’a tant 
												souvent parlé. 
												 
												Pour elle aussi, Berlin sera 
												émotif.
												 
												Daniel Lequin 
												
												
												
												danielmedaille@hotmail.com 
												
												 
												  
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