Une chronique de
 Jocelyn Daneau

mercredi 27 mai 2020

Abolir l’esprit du « Fiat Via Vi » pour la concertation

En 2020 même à l’ère de la pandémie, les villes et les régions qui gèrent leur réputation et leur image de marque comme un actif précieux ont déterminé une vision de leur avenir, qu’elles expriment généralement sous la forme d’un slogan, par exemple : Contrecoeur sur le fleuve. Ces villes nous indiquent avec confiance, savoir où elles vont en tentant longtemps d’avance, de voir loin et large c.-à-d. de tenter d’orienter leur avenir de façon organisée et concertée en embarquant tou(te)s leurs citoyen(ne)s vers une destination partagée.

Pour la MRC Pierre-De Saurel et la ville de Saurel? Malheureusement, il n’y a pas de vision c.-à-d. de slogan pour frapper l’imaginaire de tout un chacun. C’est une lacune, ne serait-ce que sur le plan de notre marketing économique et touristique. Dans ce dernier cas, il y a bien « L’Archipel aux 104 îles » relativement à Statera, mais cela n’a pas eu l’effet porteur escompté et doit être revu.

Tout ça pour vous dire que j’ai examiné la devise de la ville de Saurel. L’idée était, pour l’amateur d’histoire que je suis, de tenter de déterminer quel est l’ancrage du passé qui fait ce que nous sommes maintenant. Notons qu’une devise, souvent exprimée en latin, c’est « … une phrase courte ou une expression symbolique décrivant les motivations ou les intentions d'un individu, d'un groupe social, d'une organisation ou d'une institution, qui la choisit pour suggérer un idéal, comme règle de conduite ou pour rappeler un passé glorieux. » (Source : Wikipédia).

Première surprise qui n’en est pas une, il n’y a pas de devise pour Saurel, une ville fondée en 2000. Mais, il y en a une pour chacune des ex-villes de Sorel et de Tracy.

Deuxième surprise, les libellés de celles-ci, vieilles de plusieurs siècles, collent avec notre situation présente. Ainsi, pour Sorel, c’est « Fiat Via Vi » que l’on peut traduire par « La route se trace par la force » ou « On n'avance qu'au prix d'un effort ». Pour Tracy, c’est « Patiendo Vinces » et la seule traduction que j’ai trouvé sur Google, c’est : « Tu vaincras par la patience ».

Je n’étais pas à Tracy en 2000 lors de la fusion. Mais j’ai toujours compris que les citoyens de Tracy avaient vécu le tout et le vivent encore comme une sorte de « prise de contrôle hostile » par Sorel. En fait, « la route se trace par la force » est depuis toujours, tellement présente, que cette façon d’être et de faire s’est aussi transposée au sein de la MRC Pierre-De Saurel, dans les relations souvent antagonistes que la ville-centre et les 10 autres municipalités entretiennent.

Ce faisant, si notre région avance, le tout ne se fait pas facilement ni naturellement, mais « … au prix d’un effort ». Ce qui fait que plusieurs - citoyens, observateurs, chroniqueurs, etc. - réclament de plus en plus que nos élites politico-socio-économiques se mettent enfin à travailler ensemble, en concertation. À force de répéter le message, ils espèrent « vaincre par la patience ».

En bout de piste, la grande équipe de la région de Saurel donne l’image d’un club dysfonctionnel où dominent généralement, les relations gagnants-perdants. Ce qui n’est pas approprié pour l’image de marque et la réputation, surtout lorsque de l’extérieur, on se met à (nous) gratter un tant soit peu le vernis.

Même entre les organismes à but non lucratif, « La route se trace par la force » et là aussi, l’esprit d’équipe est déficient. Ainsi, l’annonce récente du projet de salle de spectacle COVID-19 est arrivée subitement dans le décor, sans concertation aucune avec les principaux organismes majeurs impliqués dans l’événementiel, comme Azimut Production et le GIB Fest. Ce qui aura comme effet une fois de plus, de diviser les parties prenantes et nos énergies - « On n'avance qu'au prix d'un effort » - quand il aurait été autrement plus simple et productif de se concerter.

Pendant que nous brûlons du gaz à nous chicaner comme mode de vie, nous ne prenons pas cette énergie pour concurrencer les autres régions.

Connaissez-vous les lois de Tuckman sur la gestion des équipes? Elles fonctionnent. J’ai pu le constater en plusieurs occasions dans une autre vie. Ce qui est intéressant, c’est qu’elles s’appliquent très bien chez nous, dans Pierre-De Saurel.

Étape « 1 » : FORM – C’est l’étape de la formation de l’équipe, notamment, au lendemain d’une élection. Tout le monde il est beau, tout le monde il est fin. On s’ouvre la porte, on se fait des sourires, on se paye le café; la bonne humeur est automatique. Les équipiers, ouverts, partagent leurs valeurs sans trop y réfléchir, du genre : « On se parle au lieu de s’écrire. On ne passe pas par les médias pour se dire nos vérités. » ou « Ce qui se dit dans la salle du conseil ou celle de la MRC y reste ».

 

La bonne foi des équipiers se présume. C’est le bonheur.

 

Étape « 2 » : STORM – C’est l’étape de la tempête. Celle où l’on se confronte sur la vision, l’interprétation du mandat et les objectifs, de même que sur les stratégies et les tactiques afférentes pour réaliser le tout. Surtout, c’est l’étape où les systèmes de valeurs individuels et les égos se rencontrent et se heurtent. C’est donc l’étape où les équipiers qui veulent quitter le navire le font. En ce qui concerne un groupe d’élus, ce n’est presque pas possible, du moins dans l’immédiat. Alors, de l’eau doit être rajoutée dans le vin. Sinon, le party risque d’être assez « rock-and-roll », surtout si le pouvoir d’un des équipiers est disproportionné.

 

La bonne foi des équipiers transporte les montagnes… et la mauvaise aussi.

 

Étape « 3 »  : NORM – C’est l’étape de la normalisation où des équipiers matures décident de s’accepter et de se concentrer sur la réalisation du mandat qui leur a été confié. Chacun, selon ses habiletés, finit par trouver sa place dans l’équipe, laquelle se traduit par un rôle et un ensemble de responsabilités. Le travail peut commencer sérieusement. Il y a donc convergence de vue sur les résultats à atteindre et les moyens d’y parvenir. Des remises en question et des ajustements ne sont pas à exclure. Alors, il peut y avoir un retour de la « tempête », petite ou grosse.

 

On s’organise en équipe pour gravir la montagne et on débute l’ascension.

 

Étape « 4 »  : PERFORM – Comme son nom l’indique, c’est l’étape de la performance. Il n’y a presque plus de remise en question sur le qui fait quoi. Tous les équipiers se concentrent sur la réalisation des objectifs, par exemple, l’amélioration de la qualité de vie socio-économique des citoyens. C’est la seule chose qui compte. Les personnalités et leur égo sont fondus dans l’équipe. Laquelle devient plus grande que la somme des individus qui la composent. Bref, l’équipe a développé une mentalité de gagnant et elle veut gagner. C’est seulement à cette étape qu’elle peut nous surprendre.

 

On arrive alors au sommet de la montagne en équipe, vainqueur.

 

Où en sommes-nous dans Pierre-De Saurel en termes de vie d’équipe? Chacun jugera. Personnellement, je dirais que nous oscillons depuis trop longtemps entre 2 étapes. Clairement, il serait grand temps de nous extirper de l’étape « 2 » avant que cela ne devienne une normalité. Il nous faut inscrire le mot « concertation » à notre agenda, comme l’avait fait Albert Khelfa lorsqu’il avait été élu député de Richelieu à l’Assemblée nationale en 1985.

 

Jocelyn Daneau, isolé et fatigué des chicanes, jocelyndaneau@gmail.com

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