Une chronique de
 Jocelyn Daneau

dimanche 07 juin 2020

Population jeune, piétons et affirmations à Saurel

J’ai encore en mémoire mes années d’adolescent où mon excitation du vendredi soir à me garrocher dans le Carré, n’avait d’égale que mes espérances hormonales. Je partais alors de Tracy, coin Cournoyer et Marquette, comme une tête chercheuse, vêtu Michel Ayoub pour faire 18 ans, direction Sorel, parce qu’à l’époque, le pont Turcotte, c’était comme une frontière, on entrait presque en territoire hostile. Imaginez, un gars de Tracy qui venait voir les filles de Sorel; sacrilège.

C’était une époque bénie, il y avait des jeunes partout, qui circulait sur le quadrilatère Roi-Augusta-Prince-George dans tous les sens, sans parler du trafic. Il y en avait O’Kiosque, O’Buro, l’Auberge et ailleurs, tant il y avait de choix qu’il fallait aussi choisir. Quelle époque!!! Depuis, de fermetures en décrépitude, le Carré a été laissé à lui-même. Même le St-Thomas flambant, n’a pu rallumer sa flamme; nostalgie.

Des jeunes, nulle part

Exemple : j’ai compté que plus de 80 % des personnes photographiées sur ma photo-souvenir de nos retrouvailles de nos 50 ans avaient quitté la région. Pourquoi ? C’est une constante de l’émigration : on ne quitte pas sa région (son pays), si elle nous offre des possibilités de nous épanouir. Pourquoi alors, nos jeunes nous quittent-ils encore aujourd’hui?

Selon Statistique Canada (Recensement 2016), 12,2 % de la population de Saurel est composée des 0-14 ans contre 16,3 % pour l’ensemble du Québec; sachant que Saurel selon l’Institut de la Statistique du Québec n’a jamais dépassé 35 000 habitants depuis 20 ans. Pourquoi ne pouvons-nous pas attirer de jeunes familles dans notre région? C’est quoi le problème?

L’une des conséquences de ce nombre de 0-14 ans en retrait, lorsque le gouvernement du Québec décide de ses choix d’investissement publics pour en maximiser l’impact, c’est que pour le même équipement (ex. : un centre aquatique multifonctionnel), il sera moins utilisé à Saurel qu’à Varennes, avec 17,6 % de 0-14 ans. Alors, il y a des (non) choix qui s’imposent d’eux-mêmes. Gardons espoir.

Globalement, il faut répondre à la question, que l’on évite depuis trop longtemps : « Pourquoi la population de la MRC de Pierre-De Saurel est-elle stagnante à 50 000 habitants et celle de Saurel à moins de 35 000, dans la durée? » Autrement dit, pourquoi environ 50 % des personnes qui viennent quotidiennement travailler chez nous n’y habitent pas? Au-delà de la réponse et de l’identification des causes afférentes, quel est le plan pour y remédier?

Piétonnisation

Les avis sont mondialement partagés et le débat toujours en cours : « Est-ce que post-pandémie, nous vivrons différemment, posant l’hypothèse que notre qualité de vie sera verte(ment) améliorée. »

Mais chez nous, merci la pandémie, nous aurons enfin un début de piétonnisation du centre-ville historique du Vieux-Saurel. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette décision qui, il faut quand même le dire, aurait dû être prise depuis des années, tant le nombre de suggestions citoyennes y inclinait sans jamais défaillir. Espérons maintenant que le peuple sera au rendez-vous et n’ira pas dépenser son argent ailleurs – au 10/30, dans les Cantons de l’Est, à Trois-Rivières, à Drummondville - après un premier tour du Carré.

Osons aussi espérer que cette initiative de piétonnisation ne sera que le premier geste d’une réelle volonté de redynamiser dans la durée, le centre-ville historique de Saurel. N’ayons pas peur de le dire, le patient maintenant sur le respirateur artificiel, a été tellement négligé malgré les concerts de cris de détresse, qu’il sera difficile à sauver; cela prendra beaucoup de soins et d’amour.

Globalement, au-delà de l’obligatoire plan de développement qu’il requiert, le centre-ville du Vieux-Saurel doit dorénavant être clairement identifié pour ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être, le coeur de la région de Pierre-De Saurel. Il doit donc faire l’objet d’une vision globale de son développement avec une image marketing appropriée, comme point de convergence c.-à-d. de destination.

Autrement dit, nous devons éviter de nous disperser en tentant de créer des zones d’attraction artificielle. Par exemple, il faut que notre développement touristique tourne autour de notre centre-ville historique et non pas l’inverse, comme ce fut le cas avec Statera sur le quai Catherine-Legardeur.

Ceci étant, il faut sauver Statera et le repositionner là où il aurait toujours dû être, comme une activité complémentaire, accrochée à la locomotive notre centre-ville. D’ailleurs, cette stratégie mal avisée au départ de tout concentrer sur le quai Cathrine-Legardeur, décriée dès le début par par plusieurs dont l’auteur de ses lignes, a cannibalisé depuis trop longtemps le développement du centre-ville de Saurel et même, la majeure partie de notre développement socio-économique régionale.

Espérons donc un jour, voir par exemple, le Marine Cabaret renaître de ses cendres dans ce bâtiment patrimonial à rénover qui l’abrite depuis toujours. Espérons voir de la rénovation et de la couleur dans notre centre-ville historique du Vieux-Saurel où nous pourrons y accéder par des rues pavées bordées de fleurs et de bancs.

Suggestion stratégique : Le centre-villes historique du Vieux-Saurel et le concept de Carré – font partie de l’imaginaire collectif. C’est l’un des mythes fondateurs de Saurel et de la région. Le nier induit des décisions contre nature. Il serait donc opportun d’y attacher comme des wagons, tant Statera que le projet de Centre d’arts contemporains. Ces 2 projets gagneraient en acceptabilité sociale si on les intégrait dans une vision crédible de redynamisation du centre-ville.

Rentabilité économique de l’industrie culturelle

On le sait, les médias sociaux en général et Facebook en particulier sont le lieu par excellence comme le disait Nicholas Nigroponte du Media Lab du MIT, pour les voyeurs et les exhibitionnistes. Ainsi, cela permet à ces derniers de faire des affirmations diverses, en les présentant comme irréfutables et vérités absolues et de s’y appuyer pour se gouverner. Cela permet donc aux voyeurs comme votre chroniqueur de tomber sur quelques perles qu’il convient de commenter.

Sans entrer dans les détails, la rentabilité financière d’un projet est différente de sa rentabilité économique. C’est ce dernier concept qui doit être utilisé pour analyser les projets publics, comme la décision par l’État d’investir dans un projet comme celui de Centre d’arts contemporains. De même, toujours sans entrer dans les détails, il existe une abondante littérature sur la rentabilité économique de l’industrie culturelle, qu’il serait trop long d’en faire état dans cette chronique. Mais, il est généralement admis que celle-ci est un puissant moteur de développement socio-économique.

Cependant, il est faux à sa face même, d’affirmer que la culture n’a pas à être rentable, économiquement. Si tel était le cas, tous projets culturels seraient largement subventionnés au détriment par exemple, du sport. Dans la répartition de ses enveloppes budgétaires, l’État élimine donc de facto, tous les projets culturels qu’elles jugent non socialement rentables. Si un projet culturel peut exprimer sa rentabilité de plusieurs autres façons. On parle alors d’intangibles et leur évaluation comparative avec celles du sport par exemple, relève souvent de l’ésotérisme.

Il est donc tout aussi faux d’affirmer que les retombées économiques d’un projet culturel sont toujours positives (rentables) pour une région, peu importe le domaine. Si tel était le cas, le moindre projet culturel serait alors subventionné, sans égard à ses qualités intrinsèques; créant ainsi des troupeaux « d’éléphants blancs ». À ce titre, prenons l’exemple de Statera, un OBNL que l’on peut facilement associer à un projet culturel. Dans l’hypothèse de déficits annuels successifs, allons-nous y pomper du fric citoyen à perpétuité?

Revenons au projet de Centre d’arts contemporains. J’ai lu sur Facebook que ce projet ne nécessitera aucun coût pour la ville de Saurel. Vous connaissez le principe du « Tant qu’à y’être »? Jamais, est un mot à proscrire de son langage, dans presque toutes les dimensions de l’activité humaine.

Jocelyn Daneau, isolé, mais pas mal moins, jocelyndaneau@gmail.com

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