Where is the beef?
Les 28 et 29 janvier 2013, la
ville de Sorel-Tracy tenait des
consultations-citoyennes
relativement à son "Plan
d'urbanisme"
***. Voici ma
contribution-citoyenne.
Qu'est-ce que l'urbanisme?
Pour un non-urbaniste, c’est : "L'art
d'aménager un territoire".
C’est une
vision
à la fois spatiale et temporelle
des usages de l’endroit où l’on
vit, en l'occurrence
Sorel-Tracy; y incluant des
stratégies, des orientations et
des moyens de mise en oeuvre. On
parle alors du fond des
choses c.-à-d. du contenu.
Qu'est-ce qu'un plan?
C'est un document. Il consolide
un ensemble ordonnancé d’étapes
qui sont requises pour atteindre un but. Il contient pour
chacune d'elles, des livrables
(des objectifs mesurables) et
des dates de réalisation. Un
plan efficace est structuré pour
qu’il soit facile d’en suivre la
réalisation. Un plan sans suivi
régulier n’est d’aucune utilité.
On parle ici de la forme
des choses c.-à-d. du
contenant.
Tant sur le fonds que sur
la forme, ce “Plan
d’urbanisme” laisse
perplexe.
Sur la forme, ce “Plan”
défie plusieurs des lois du
genre. Sur 74 pages, 38
constats, 36 enjeux et 110
propositions de "moyens de
mise en œuvre", il n'y a
AUCUNE date de réalisation en
terme d'échéancier. Aucun de ces
“moyens” n'est accompagné
d'un élément de mesure
permettant d'en suivre le degré
de réalisation. C’est comme une
boussole sans aiguille.
Ce “Plan” souffre d’un
profond déséquilibre entre ses
parties “descriptive” et
“orientation”. Des
efforts considérables y ont été
consentis pour compiler des
données qui donnent un portrait
statistique fort intéressant de
notre ville. Malheureusement,
celui-ci perd en crédibilité par
l’utilisation des données du
recensement 2006 quand celles de
2011 seront bientôt
disponibles.
On a l’impression qu’une fois la
partie “descriptive”
terminée, il ne restait plus
d’espaces pour réfléchir sur ce
que devrait être demain, le
territoire de Sorel-Tracy. En ce
sens, sur le fond des
choses, ce “Plan” ne
présente aucune vision du
devenir territoriale de
Sorel-Tracy, aucune idée
maîtresse. On se contente de
proposer six “Grandes
orientations” (page 52)
censées être le cœur de notre “Plan
d’urbanisme”. En fait, il
s’agit plutôt de “têtes de
chapitre” que l’on pourrait
retrouver dans un bouquin sur
les différentes théories en
urbanisme.
Les voici, à vous de juger.
1.
Continuer à inscrire le
territoire dans une perspective
de développement durable, et ce,
dans un contexte péri
métropolitain;
2.
Favoriser le développement
résidentiel neuf et le
redéveloppement;
3.
Stimuler la demande externe et
interne du marché immobilier
résidentiel;
4.
Renforcer les activités
économiques existantes en
optimisant les acquis et en
évitant la concurrence;
5.
Protéger et mettre en valeur les
potentiels du territoire afin
d’améliorer la qualité de vie;
6.
Maintenir et renforcer la
qualité de l’environnement
naturel et bâti.
De façon
terre-à-terre, nous aurions pu
nous attendre à des orientations
concrètes. Par exemple : « Déménager
la traverse entre Sorel-Tracy et
Saint-Ignace-de-Loyola dans
l’emprise de la centrale
thermique d’Hydro-Québec
actuellement en démantèlement ».
Les “Grandes orientations”
proposées par l’actuel “Plan”
amènent à une ribambelle de 110
“Moyens de mise en œuvre”
dont plusieurs sont d’une
qualité douteuse. Nous citoyens,
avons payé pour nous faire dire
des généralités du genre: “Cibler
la clientèle future”, “Adapter
les services publics à la
réalité démographique” ou “Harmoniser
la qualité des usages”.
Parmi tous les “moyens”
proposés, un qui m’a laissé
pantois par son irréalisme : “Évaluer
l’opportunité de desservir le
secteur de Sorel par le réseau
ferroviaire”. On ramène même
l’idée d’un pont entre
Sorel-Tracy et la Rive-Nord,
projet à l’évaluation économique
éternellement déficitaire qui
n’a d’ailleurs jamais levé.
Le tout manque de sérieux.
Tellement qu’on a l’impression à
la lecture du “Plan” que
les
auteurs
ont rédigé ce document de façon
à ce qu’il enfante une multitude
de mandats supplémentaires, des
“extras”.
Ce “Plan” mélange les
genres en abordant la faiblesse
de notre stratégie de
développement touristique (p.35)
ou en s’invitant dans la
politique culturelle et la
préservation du patrimoine bâti.
Il
aborde l’Agenda 21 local, une
des démarches phares de notre
ville. Mais en ignore la
vision opérationnelle
concernant les “collectivités
innovantes”
et les
“quartiers porteurs de santé”,
même si on ne sait pas trop ce
que ces deux notions veulent
dire.
Ce “Plan” est presque
TOTALEMENT silencieux quant aux
principaux enjeux d’aménagement
de notre territoire. Outre le
déplacement de la traverse, nous
aurions pu nous attendre à des
idées ou des réflexions
concernant:
1.
Un concept d’aménagement urbain
en continum, intégrant le Carré
Royal en passant par le marché
Richelieu et longeant le fleuve
St-Laurent jusqu’aux limites de
la ville.
2.
L’aménagement des berges du
St-Laurent et du Richelieu.
3.
L’aménagement de l’espace
entourant le “nouveau”
marché Richelieu.
4.
L’aménagement du Quai 2.
5.
L’implantation de l’Écomonde.
6.
L’agencement des rues
relativement à la vitesse
excessive des automobiles.
7.
L’utilisation du Carré-Royal.
8.
Le développement de la ville en
direction de Contrecoeur.
9.
L’espace à consacrer aux jeunes
dans une ville où la majorité
est vieillissante.
10.
Des avenues de solution à la
problématique de la route
industrielle.
11.
Le développement d’une zone pour
favoriser l’éclosion d’une “Silicon
Valley”
de l’écologie industrielle.
12.
Le prolongement de la 30 vers
Trois-Rivières;
13.
Etc.
En conclusion, sauf pour sa
partie "portrait statistique",
ce "Plan d'urbanisme"
(c.-à-d. uniquement le projet de
règlement 2221) doit être
retourné sur la planche à
dessin. La réflexion sur
l’aménagement présent et futur
du territoire de Sorel-Tracy
reste à faire.
Jocelyn Daneau
jocelyndaneau@gmail.com
*** Cette chronique porte
uniquement sur le
Projet de règlement no 2221-
plan d'urbanisme. Elle ne
porte pas sur les aspects
réglementaires de l’aménagement
du territoire de Sorel-Tracy :
les Projets de règlement 2222 à
2227. Aussi, elle ne porte pas
sur le contenu des différentes
cartes géographiques proposées.
Idiome
américain :
Where's the beef?
Traduction libre : « Où est
la viande? ». « Où est la
substance dans ce que vous
avancez? Où est le contenu?
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