LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : mardi 19 juillet 2011 12:26

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NÉCROLOGIE

NOUS JOINDRE



           
LA CHRONIQUE, DE JOCELYN DANEAU
 

mardi 19 juillet 2011

« Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage »

L’autobus express pour Montréal que j’utilise quotidiennement n’est pas sans danger. L’autre jour, j’ai failli y « tourner de l’œil » en lisant le Plan d’action 2011-2015 de la politique culturelle de Sorel-Tracy (1) publié pour consultation le 20 avril 2011. Après la « langue de bois » des politiciens, je découvrais « l’écriture de bois ». Revenu de ma surprise, ma principale question était : « Sous quel angle analyser ce document? » Comme contribuable? Comme chroniqueurJ’hésitais. En fait, je me sentais comme un professeur devant le travail bâclé et sans imagination d’une équipe d’étudiants brillants. J’ai donc opté pour une analyse de type professeur/coach avec à la fin, l’obligation de noter ce travail. 

Sincèrement, j’aurais aimé dire à propos de ce Plan d’action : « Voilà un truc qui va nous différencier et propulser Sorel-Tracy vers un sommet ». J’aurais aimé débarquer de l’autobus, euphorique et crier : « WOW ». 

Sur la FORME, ce Plan d’action est terne. L’activité culturelle n’est-elle pas joyeuse? C’est aussi un document verbeux, caractéristique des écrits en manque d’idées ou d’actions concrètes. Un exemple? Le mot « musique » et l’Harmonie Calixa-Lavallée y sont ignorés. Ne sommes-nous pas au pays de Georges Codling? 

Mais O bonheur! Il y a 11 principes directeurs dont 10 sont copiés intégralement de la Politique culturelle de Sorel-Tracy de 2001 (2). On dirait une famille nombreuse de Tanguy, composée de jumeaux et de triplets qui collent à la maison faute d’avoir évolué. Habituellement, quand il y a beaucoup de principes directeurs dans un document (de 17 pages), c’est une indication que son objectif principal est mal maîtrisé. Habituellement, quand les mêmes libellés sont utilisés dans une mise à jour, surtout aux 10 ans, on peut soupçonner une certaine paresse intellectuelle. Quelle est l’utilité d’un principe directeur sur le rôle des employés municipaux? Leur rôle n’est-il pas couvert par les conventions collectives et le droit de gestion de la ville? 

Il y a plusieurs engagements (c.-à-d. des orientions) dans ce Plan d’action et j’ai fini par comprendre que la ville de Sorel-Tracy se positionnait en support de l’activité culturelle. Ce manque de clarté contribue en partie au fait que j’ai eu de la difficulté à séparer les actions réelles des vœux pieux et des activités de gestion quotidienne. Par exemple (p.6), « S’assurer des ressources humaines, matérielles et financières nécessaires » est essentiellement la description standard d’une activité de gestion quotidienne, non pertinente dans un Plan d’action. 

Grave lacune, ce Plan d’action ne contient aucun échéancier, aucun indicateur pour en suivre l’évolution et la réussite. Côté coût/budget, c’est le néant. Aucun responsable n’est identifié. Pourtant, c’est la base dans ce genre de document. Une « action » sans indicateur, c’est comme des Fettucini sans Alfredo! 

Ce Plan d’action gagnerait à ne pas mélanger les genres. Qu’est-ce que l’Agenda 21 local vient y faire? Un lien à venir avec l’Agenda 21 de la culture? Je ne suggère pas de gérer la ville et ses projets en silo, mais s.v.p., évitons de nous éparpiller. Bref, le plan stratégique de la ville pourra éventuellement faire la synthèse de tous nos plans d’action sectoriels.  

La phrase suivante me laisse perplexe sur le plan éthique : « Le bilan du premier plan d’action est surprenant » (p.2). On parle ici sans le citer, du Bilan 2009 (3) de la Politique culturelle 2001. Savez-vous qu’en partie, ce sont les mêmes personnes qui ont rédigé le Plan d’action 2011-2015, le Bilan 2009 et contribué à la réalisation de la Politique culturelle de 2001. C’est ce que l’on appelle de « l’auto-flattage de dos », une caractéristique sclérosante des petites villes. 

Il est difficile dans un document de séparer la FORME du FONDS des choses. Dans ce dernier cas, ce Plan d’action comme pour la Politique culturelle de 2001 se caractérise par l’absence d’un énoncé de vision. Je n’y ai pas trouvé d’idée centrale ou de point d’ancrage sur lequel me raccrocher. C’est une grave lacune. Pourtant, le communiqué de la ville de Sorel-Tracy mentionnait explicitement : « … afin de confirmer notre vision et de bonifier notre travail… » Fondamentalement, que veut-on faire en matière de culture à Sorel-Tracy? 

Une suggestion de vision pour notre politique culturelle? « Sorel-Tracy, ville d’art et d’eau ». « Art et eau » : deux mots pour bâtir un concept et éventuellement, aboutir à des actions concrètes. Il ne manque que la rigueur et la sueur. 

Pour quoi voulons-nous être reconnus? Pour le volet culturel du Festival de la Gibelotte qui est absent de ce Plan d’action. Un plan d’action permet de planifier des activités pour nous amener quelque part. Je vous donne un exemple (p.13) : « Assumer un rôle de pôle culturel régional ». Cet engagement est intéressant. Malheureusement, les actions qui y sont associées et dont je vous épargne l’énumération se termineront en placotage autour d’une table. Je sens déjà l’odeur de la tisane. 

Ce Plan d’action manque d’envergure. De façon surprenante, la plupart des partenaires culturels de la ville de Sorel-Tracy et de la région y sont absents. Où est Azimut Diffusion, à qui nous versons annuellement une généreuse subvention? La 9e édition du Festival de musique classique vient de se terminer en beauté. Il n’y a aucune indication relativement à l’implication de la ville quant aux suites. Les forces vives de notre ville doivent être des partenaires majeurs dans ce Plan d’action. 

Il n’y a aucune mention de projets mettant en valeur deux des endroits extraordinaires que nous possédons : le Carré Royal et Regard sur le fleuve. Cherchez les villes qui peuvent se vanter d’avoir trois bords de l’eau majeurs à mettre en évidence!?  Un « étrange » qui regarderait ce Plan d’action penserait que Sorel-Tracy est une ville morte et désertique en matière de culture. Pourtant, citoyens contribuables de Sorel-Tracy, nous payons 2 fois pour une Politique culturelle. La MRC Pierre-de-Saurel dont nous représentons 68 % de la population en possède une. 

ATTENTION, comment devons-nous interpréter l’action suivante : « Augmenter les espaces de la bibliothèque Le Survenant en la transférant dans l’église Notre-Dame afin de… ». En droit, il existe un principe : « On ne peut faire indirectement ce que l’on ne peut pas faire directement ». Autrement dit, est-ce une tactique douteuse pour faire avaler aux citoyens un projet qui pour l’instant, est loin de faire l’unanimité? 

Globalement, les auteurs de ce document ont confondu démocratisation de la culture et nivellement par le bas. La culture pour émerveiller les citoyens doit être un brin élitisme. C’est l’essence même du talent. 

Maintenant, la question qui tue : « Quelle note donner? » Au début de ma carrière, j’ai eu une patronne qui avait été une Olympienne, une vraie. Elle avait pour notre travail, des objectifs olympiques et à la fin de l’année, des critères d’évaluation encore plus sévères. Professionnellement, ces années ont été pour moi les plus dures, mais rétrospectivement les plus formatrices. Oui, oui je sais, la note!? Un généreux « D » avec un droit de reprise. 

Vous me trouvez sévère? Sachez que je viens de vous parler d’excellence. Vous trouvez que j’ai la critique facile? Sachez que je viens de vous parler de rigueur. Vous pensez que je suis exigeant? Sachez que si Sorel-Tracy veut être attrayante et unique, il nous faudra en payer le prix. Parlez-en à Céline Dion qui à chaque spectacle, va bien au-delà de son immense talent naturel.  

Les chapitres les plus percutants et imaginatifs de ce Plan d’action se doivent maintenant d’être écrits. 

Jocelyn Daneau
Fier citoyen de Sorel-Tracy!
Site internet :
http://jocelyndaneau.com/

Pour commenter directement cette chronique : http://wp.me/p1chFg-5x

(1) voir : http://www.ville.sorel-tracy.qc.ca/DATA/PDF/273.pdf
(2) voir : http://www.soreltracyregion.net/culture/docs/politiqueculturelle.pdf
(3) voir : http://www.ville.sorel-tracy.qc.ca/Data/PDF/217.pdf 

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