mercredi 05 septembre 2007
La passion du son a conduit Pierre Plante à Radio-Canada
par Jean Doyon

Qu'est-ce que la passion du son ? C'est d'aller voir un spectacle et écouter le son avant la musique. Écouter voir si tout le monde est entendu. Est-ce qu'on entend bien le chanteur ou l'instrument qui prime ? Est-ce que le son me détend ou est-ce qu'il m'agresse ? C'est habituellement ce genre de question de base que se pose un « soundman » ou preneur de son, lorsqu'il se trouve devant une scène ou à l'écoute d'un CD.

Voici le portrait d'un passionné de son, de technologie, de sonorisation et de musique par conséquent, un sorelois pure laine, connu du milieu musical régional, national, et international, puisqu'il travaille à la radio de Radio-Canada depuis 16 ans, maintenant comme sonorisateur « senior », Pierre Plante.

Un peu d'histoire

Surnommé Peter, (prononcer Pééteur) par un membre du groupe Gibraltar aux débuts des années 80, Pierre Plante a su faire son chemin avec passion dans un métier difficile et très exigeant. Georges Nicholson, animateur à la radio de Radio-Canada, a dit de lui, une semaine avant l'entrevue, qu'il était l'un des meilleurs preneurs de son de groupe "live" qu'il connaisse. « Et je ne vous dis pas ça parce qu'il est votre ami, c'est vrai, il est très bon ! », me confirmait-il.

D'ailleurs, c'est son travail que vous entendez lorsque vous écoutez les nouvelles émissions de Christiane Charette à la première chaîne de Radio-Canada. « Mon grand-père Laferrière était un passionné de radio à ondes courtes. Il fut mon premier contact avec la radio, car on passait des soirées à écouter ça ! Il aurait sûrement été très fier d'apprendre que je suis rendu à Radio-Canada. », racontait Pierre Plante.

Son intérêt pour le son a commencé à l'adolescence, alors qu'il travaillait au Café-Théâtre, Les Beaux Instants, dont le regretté Pierre Martin en était le directeur. « J'étais bassiste dans ce temps-là et je jouais un peu de musique ici et là. Je m'occupais de la salle ainsi que de l'éclairage à l'époque, et lorsqu'il y venait des artistes, je posais plein de questions à un sonorisateur du nom de Landry. J'aimais l'aspect auditif et la technologie ! » 

Par la suite, il travailla à l'auditorium du Cégep de Sorel-Tracy, et c'est justement durant l'un de ces concerts, au Cégep, qu'il fut repêché. « Gibraltar m'avait remarqué et j'ai vraiment commencé à faire de la tournée, comme "soundman", avec ce super groupe local, qu'on entend parler encore aujourd'hui et qui faisait dans le Pop-Rock Progressif. C'est à ce moment que j'ai développé un goût pour ça. On n’était pas payé cher, mais on apprenait et on explorait des choses. On voyait du pays et à 17-18 ans c'était très excitant ! »

Quelques années plus tard, Pierre devait prendre le tournant de sa vie. « J'ai dû choisir entre une carrière de bassiste ou me diriger vers le "sound engineering". Avec le recul, j'ai fait le bon choix. »  Il entra en « recording / engineering » à l'Institut Trebas de Montréal. Après y avoir gradué, Plante alla travailler à Québec faire de la sonorisation sur la Place Royale pour des événements organisés par le ministère des affaires culturelles.

Il décida par la suite de revenir au Cégep de Sorel-Tracy afin de compléter un DEC en électronique. « J'ai donc recommencé à travailler pour Azimut et aussi pour l'auditorium du Cégep. Tout en poursuivant mes études, je tournais aussi avec un groupe de jazz de Québec qui s'appelait « Contrevent », qui m'a amené à St Pierre et Miquelon et en Louisiane. Puis, j'ai terminé mon DEC au cégep de Maisonneuve à Montréal en télécommunications. Deux copines de Cégep, qui travaillaient à la SRC comme auxiliaires, réussirent à me convaincre de remplir un formulaire d'emploi pour Radio-Canada, tout en ayant la certitude que ce rêve était impossible pour moi. Par un hasard extraordinaire, j'ai passé une entrevue pour eux, et en remettant mes travaux de fin d'année au Cégep, je venais d'apprendre que j'entrais à Radio-Canada, le 3 juin 1991. J'ai eu une semaine entre la fin de mes cours et le début de mon travail. On appelle ça, des études payantes ! », racontait Pierre avec humour.

Il fit ses débuts comme appariteur, qui est en fait l'assistant du technicien de son. « J'ai appris beaucoup parce que je me suis retrouvé à travailler sur tous les gros shows de radio. J'ai donc appris avec les meilleurs et les plus expérimentés. Environ sept ans plus tard, je suis devenu sonorisateur chef, ou "sound engineer", et je travaille beaucoup ici, au studio 12 de la SRC (Société Radio-Canada) et son système d'acoustique variable. Un technicien senior c'est un chef d'équipe qui doit connaître tout le fonctionnement audio, autant en sonorisation, en prise de son, en diffusion, en passant par les moniteurs de scène. Ça donne une vision d'ensemble, et importante particulièrement dans le choix des micros. »

L'un des aspects intéressants selon lui, c'est de travailler avec de la technologie de pointe. « C'est une chance extraordinaire d'avoir un environnement de travail à la fine pointe, et de travailler pour un employeur qui veut suivre la technologie aussi, c'est pas toujours comme ça partout. C'est à mon avis, ce qui donne une particularité unique au son de Radio-Canada. »

Ses influences :

« J'ai travaillé beaucoup avec Denis Leclerc, j'ai été son adjoint pendant longtemps. Je peux dire que j'ai un peu la même facture sonore que lui. Avec Leclerc, il y avait Michel Larivière aussi. C'était deux grands chums qui ont débroussaillé le côté POP de la SRC en les amenant à s'intéresser, et à s'équiper en conséquence. Alors, c'est probablement pour ça que je fais essentiellement du JAZZ et un peu de POP. »

Ses réalisations :

« Ma première captation fut avec un groupe de musique klezmer (musique juive) de Boston, et par un hasard, il y a une des pièces que j'ai enregistré qui s'est ramassé sur une anthologie de la musique klezmer de l'EST des USA. J'ai reçu une copie de ce disque deux ans plus tard. J'ai commencé à travailler au studio 12 plus régulièrement à partir de 98, avec l'émission Jazz Beat sur le réseau CBC, c'est moi qui captais ça ! »

Il faut savoir aussi qu'une grande partie du travail de Pierre consiste à travailler en studio et faire de l'enregistrement d'album ou de démo. « Je dirais que 50% d'utilisation du studio 12 maintenant est en location. Les gens sortent d'ici avec un démo ou carrément un produit pour réaliser un disque. Je fais de 4 à 6 projets d'albums par année, pour une compagnie de disque identifié au JAZZ, Effendi Records. Par exemple, dans deux mois on sort le prochain François Bourassa qui a été enregistré ici en juin dernier. J'avais enregistré l'album précédent de Bourassa, "Indefinite Time", et nous avions gagné le FÉLIX de "l'album de l'année JAZZ" en 2004.»

« En 2005, j'ai été nominé dans la catégorie ingénieur de l'année pour l'album de " Michel Donato et ses amis européens VOL I". Cette année, j'avais trois disques en nomination dans la catégorie JAZZ dont Joël Miller (Effendi record). Jean-Pierrre Zanella était en nomination aux Juno's Awards ainsi qu'à l'Adisq, et on a gagné un prix OPUS album jazz de l'année. Le calibre de jazz au Québec est très fort. J'ai travaillé avec Carquois, Malajube au Spectrum lors du 5e anniversaire de Bande à part, Buddy Guy au Métropolis, il y a quelques semaines, 3 concerts de Pat Metheny au Spectrum, Yann Perreault et plein d'autres. »

Pierre Plante expliquait qu'il avait un meilleur contact avec les artistes du temps qu'il était adjoint, puisque son travail se passait sur scène, directement avec les artistes, alors que maintenant c'est plutôt derrière une console de son que se réalise la majeure partie de son travail. « C'est moi qui branchais les instruments et plaçais les micros des artistes. J'ai rencontré des grands noms du blues et du jazz comme : John Scofield, Joe Levano, Sonny Rollins, au théâtre Maisonneuve à l'époque. Étant devenu preneur de son, je suis derrière une console ou dans mon mobile bien plus en contact avec le producteur qu'avec l'artiste. »

Une passion

À 42 ans, Pierre Plante est aujourd'hui père d'un garçon de 4 ans, Henri, et habite dans le vieux Rosemont, à Montréal, avec sa conjointe Sylvie Lavoie, une ontarienne de Sudbury. Il a choisi un parcours moins "glamour", croit-il, alors que ses amis ont plutôt opté pour des tournées avec des artistes et voyager. « J'ai choisi une qualité de vie qui est autrement différente que ces gens-là. »

« Maintenant, c'est moi qui donne de la formation pour la console ici et je suis consulté, avec d'autres techniciens lorsqu'on a besoin d'acheter de l'équipement ou de soumissionner sur des projets de rénovations, ou pour assister à des SALONS qui nous présentent les dernières nouveautés. »

Une chose est sûre, c'est que c'est le même Pierre Plante aussi énergique et travaillant que j'avais rencontré, il y a plus de vingt ans, et son amour pour le son et la technologie est toujours aussi présent !

Jean Doyon
SorelTracy Magazine

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