samedi 01 décembre 2007

Un pianiste professionnel qui pratique sans arrêt
Pour Pierre Millette, la musique fut sa première grande décision
par Jean Doyon

Dans une série de reportages du SorelTracy Magazine, sur les sorelois qui oeuvrent à l'extérieur de la région, en voici un, bien connu des sorelois, Pierre Millette. Plusieurs l'identifient comme l'un des plus talentueux pianistes générés par la région du Bas-Richelieu, d'autres vous diront qu'il fut l'un des plus beaux espoirs au hockey. Mais, tous seront unanimes pour vous dirent qu'il est une personne extrêmement sympathique, et que sa bonne humeur, son charisme et sa gaîté, le caractérisent plus particulièrement. Juste pour vous dire, à une certaine époque, Pierre était le musicien chéri de la région, celui par qui la musique passait, on le voyait partout. Nous l'avons rencontré il y a quelques semaines, afin de prendre de ses nouvelles.

Il n'arrête jamais

Écrire un résumé de la vie de Pierre Millette, n'est pas une mince affaire, puisqu'il faut écrire plusieurs histoires en même temps. Millette n'arrête jamais, il est toujours actif, il est toujours en mouvement, il est toujours impliqué quelque part, son horaire du temps est réglé au quart de tour, et il est très rigoureux sur ses entraînements soit au piano ou même physiquement.

Né à Sorel, le 9 mai 1959, Pierre Millette vit maintenant à Varennes afin d'être un peu plus près et au centre de son « réseau » de travail. Présentement, il dirige une revue musicale qui s'appelle « Sous les ponts de Paris », des Productions Phaneuf, qui est un ensemble de chansons du répertoire parisien. « Nous sommes cinq musiciens et quatre chanteurs et on se promène partout au Québec. » Il enseigne le piano en privé, mais également dans les écoles, tantôt à St-Hyacinthe, tantôt à Sorel-Tracy. « En demeurant à Varennes, je suis à environ 20 minutes de tous mes lieux de travail, car une grande partie de mon travail est à Montréal. Mais, c'est quand je reviens à Sorel que je me sens le plus chez moi. »

Plusieurs l'ont vu à l'oeuvre au Casino de Montréal, alors qu'il a joué à cet endroit pendant plus de 4 ans. « On s'est fait remarquer lors d'une réception au casino de Montréal avec mon Trio jazz. Un mois plus tard, nous étions engagés pour faire les premières parties de tous les spectacles qu'on y présentait. Pendant plus de 4 ans, 5 soirs par semaine on faisait les premières parties. Pendant ces années-là, j'ai eu trois semaines de congé en tout. Ce passage au Casino de Montréal m'a permis de connaître une très grande majorité d'artistes québécois très connus. »

Très jeune, on l'avait remarqué

Dès ses premiers coups de patin, on lui prédisait un brillant avenir au hockey. Il détient encore un record qui date d'une saison Mosquitos de 1969-70, avec les Pionniers de St-Pierre, alors qu'en 16 rencontres, il avait marqué 42 buts et cumuler 24 passes pour un total de 66 points. « C'était l'année qui précédait la venue de l'Inter-Cité, et à cette époque, il n'y avait pas de BB ou de AA. », précisait Millette. Par contre, il faut comprendre qu'au cours des années qui ont suivi, le hockey mineur ne rendait plus disponibles les statistiques des marqueurs pour toutes sortes de raisons. Il devenait donc difficile de retracer l'histoire de ces pointeurs dans notre région.

Pierre Millette, c'était à l'époque, le petit gars parfait, celui dont les mères rêvaient, obéissant, toujours très poli. Un jour au hockey, l'équipe s'était impliquée dans une bagarre générale, Pierre avait jeté les gants et très choqué, Millette disait à l'autre joueur : « ... ah ben toé mon tabarnouche ! »..., il ne sacrait jamais. Étant fils unique, on le savait très chouchouté et quand on le voyait, on aurait dit que c'était lui qui avait inventé le bonheur.

Une jeunesse de hockey et de musique

Vers l'âge de 7 ans, ses parents lui achètent une batterie pour s'amuser. À peine un an plus tard, son oncle Charles-Édouard Généreux l'invite à venir remplacer son batteur pour un soir, dans une noce, avec son orchestre "Les Oiseaux Bleus". « On jouait de la musique de danse, cha-cha, samba, etc..., et c'est à partir de cette journée-là que la piqûre m'est venue. Je suis resté avec le groupe pendant plusieurs années. Peu de temps après, je commençais à jouer de la trompette à l'école Mgr Desranleau. Mon père aimait la trompette, alors il m'avait dit de jouer de la trompette. Dans ce temps-là, on écoutait notre père ! »

Dans les années 80, Pépé Grimard, Pierre Millette et Michel Huard

Il suivit des cours avec le célèbre Georges Codling, et très vite il fit son entrée dans l'harmonie scolaire, puis l'Harmonie Calixa-Lavallée. « J'étais trompettiste, mais je préférais la batterie. La trompette, c'est très exigeant, quand tu fais une erreur, ce n'est pas long que tu t'en rend compte. » À 11 ans, il débute à l'orgue, dirigé alors par Yolande Poirier qui lui enseigne l'instrument. « Je n'avais pas besoin de personne pour me dire d'aller pratiquer ! » À 15 ans, Pierre commençait à jouer dans les Clubs. « Michel Huard, qui lui travaillait à la Dosco, avait les contrats de jouer pour les noces des travailleurs de l'usine. On jouait avec Pépé Grimard et quelques fois, avec le batteur Georges Casavant. »

Pierre jouait de la musique tout en se défonçant au hockey. « Au hockey, j'adorais pratiquer. J'ai toujours dit que plus tu pratiques, plus c'est facile durant les matchs. J'étais très rapide, bon manieur de bâton, un bon sens du hockey, mais à 5 pieds et 8 pouces, 145 livres, percer devenait difficile pour moi, surtout à l'époque des Éperviers de Sorel où ça brassait pas mal. Par contre, là ou ç’aurait pû débloquer c'était avec mon coach midget John Paris, le meilleur coach que j'ai eu, qui m'avait obtenu une place pour aller jouer à l'université Princetown, New-Jersey aux USA. Genre, 24 parties par saison, mes études payées, les rencontres se jouent devant environ 10 000 personnes, une belle chance quoi. Mais, ma mère a dit non ! Je n'ai absolument rien décidé. J'étais dans une douillette chez moi dans ce temps-là, alors en bon fils j'ai dit ok, on passe à autre chose, mais si c'était à refaire, j'y serais allé. »

Par la suite, Pierre Millette poursuivit quelque temps dans la catégorie Junior B et commença à se poser de sérieuses questions sur son avenir dans le hockey. « Je jouais pour les Survenants et je venais d'être échangé à St-Hyacinthe. Là, j'avais de sérieux problèmes de disponibilités, car je jouais toujours de la musique les fins de semaine, et j'ai commencé à penser aux blessures. J'ai donc accroché mes patins à ce moment-là. »

Le choix

Tout en jouant de la musique pour gagner sa vie, Pierre poursuivit ses études au Cégep en science-humaine pour se diriger vers le droit. En droit ? Comment ça, en droit ? « Parce que mon père était "contracteur" en peinture et il avait fait le tour de toutes les plus belles maisons de la région, pour finalement décider que je devais faire un notaire dans la vie. Alors, moi comme un enfant sage je me suis donc dirigé pour être notaire. Mon père était l'autorité. Il y avait une bonne différence d'âge entre nous deux et les mentalités étaient différentes. Mais, en même temps, j'avais le goût de jouer du piano jazz, alors j'ai donc trouvé un prof de Longueuil, Michel Gagnon, qui m'a enseigné le piano jazz. »

Trio Jazz

Après le Cégep, Pierre s'inscrit à l'Université en droit, en comptabilité (un autre choix de son père), et en musique (son choix). « J'ai été accepté à l'UQUAM, en science juridique. Un peu plus tard, je reçois une lettre me disant que je suis accepté aussi en comptabilité. Deux jours plus tard, je reçois une dernière lettre de l'Université qui me confirme mon droit de passage en musique. Les deux autres disciplines ont pris le bord sur-le-champ. C'était la première fois de ma vie que je prenais seul, une décision aussi importante ! »

Ses parents ont bien accepté sa décision, racontait-il, et même si son père maugréait souvent pour tout et pour rien, certains de ses gestes lui démontraient son approbation et son soutien. « Mes parents savaient comment j'étais sérieux, alors ils avaient confiance en moi. C'est quand mon père est décédé que je me suis rendu compte qu'il m'avait donné son amour par ces gestes là, car il était incapable de me le dire ! »

Pierre Millette entrait à l'Université de Montréal en piano et fit une année préparatoire, n'ayant jamais joué de classique auparavant, avant de faire son bac en piano classique pendant 3 ans à temps plein. De retour à Sorel, un bac en musique en poche, Pierre Millette ouvre son école de musique privée, tout en continuant de jouer les fins de semaine. Il donnait aussi des cours de musique chez Jazz-o-Rama, et à l'école Bernard Gariépy. « Ça roulait à fond de train. J'ai enseigné le piano privé pendant 23 ans.»

Et l'amour..... ?

Au travers ce raz-de-marée, Pierre a quand même trouvé le temps de se marier. Un mariage qui ne durera que deux ans. « Je n'étais tout simplement pas prêt pour le mariage. Ma vie roulait à 100 à l'heure. C'était ma première grosse tournée Québécoise sérieuse, avec Johnny Farago et je venais de partir mon Ballroom Orchestra et ça roulait très bien. On jouait au Club de Farago, "La vie en rose", 3 soirs par semaine, on accompagnait tous les artistes de l'époque, ce qui m'avait conduit à faire un album de Noël avec la chanteuse Sylvie Jasmin. J'étais absent de la maison et c'est là que ç'a changé dans mon couple. »

Pierre Millette Ballroom Orchestra

Plus tard, il rencontre Diane Cournoyer, une fille de Ste-Anne-de-Sorel, directrice des comptes de la Banque Royale à Montréal, avec qui il vit depuis une bonne quinzaine d'années. Des enfants ? « Non, pas avec le métier que je fais. J'enseigne à des enfants pendant le jour, et le soir quand je reviens à la maison, j'aime bien être dans mes affaires. »

« Par contre, j'aurais aimé avoir un frère ou une soeur pour discuter de la vie et d'expériences vécues. Je me suis élevé presque tout seul, et des fois je regarde des films quand le père prend son fils par le cou, en lui disant, "viens on va parler !", ou "viens on va aller à telle place ensemble", moi je n'ai pas connu ça. Les premiers mots d'amour de mes parents, "Je t'aime mon fils !", je les ai lus dans une carte de fête quand j'étais plus vieux. Ils me le disaient peut-être d'une autre manière, mais je ne le voyais pas ça. »

Pratiquer pour mieux jouer !

Quelle est la définition d'un musicien selon Pierre Millette ? « Un musicien c'est le "Playing" (le talent), l'allure, la ponctualité, être habillé proprement, pour moi, c'est ce qui fait qu'un musicien c'est un tout. J'aime diriger afin d'obtenir un résultat. J'aime que les choses se fassent à ma manière. Ça doit sonner de même, faut que ça marche de telle manière, on organise ça comme ça, c'est de cette manière que tu réussis dans la vie. Personnellement, c'est ce que je crois. C'est peut-être une question d'éducation ? Je suis un pianiste professionnel et pourtant, je pratique tout le temps. Alors, c'est normal de croire que c'est de cette manière que l'on réussit, par le travail, et ce sont ces valeurs que je tente d'inculquer aux jeunes. Mais, ça ne plaît pas toujours ! J'aime enseigner au primaire parce qu'il me semble que je leur donne une bonne base. »

Tout passe par le jazz

D'aussi loin que je me souvienne, Pierre Millette a toujours joué du jazz et du Big Band. Plus jeune, il me faisait écouter du Buddy Rich, du Glenn Miller, du Benny Goodman, mais surtout du James Last.  Ces sonorités ne me disaient absolument rien, mais lui il était en extase. Il improvisait constamment sur son orgue Hammond, il était définitivement prédestiné à ce style musical. « J'ai toujours aimé le jazz, le swing, ça vient te chercher. À l'université, j'ai fait du classique, mais je n'aurais jamais fait un concertiste. Quand tu fais du jazz tout passe par là, après le reste c'est facile. »

CV

Sur son CV, il est inscrit qu'il a accompagné des artistes comme Claude Barzotti, Mario Pelchat, Laurence Jalbert, Jano Bergeron, Gilles Girard, Patrick Norman, Evan Johannes, le groupe Butterfly et plusieurs autres. Il a fait deux albums avec Johnny Farago, un avec Sylvie Jasmin, il était directeur musical de Michel Jasmin centre-ville (TV), et une multitude de premières partie. « Dans mes projets d'avenir, j'aimerais faire un album au piano. Seul ou avec des amis, mais c'est un projet que je caresse depuis longtemps. Dans le plus concret, je vais terminer mon brevet d'enseignement en janvier prochain, et ça, ça va me donner de la stabilité au niveau de l'enseignement dans les écoles. Mais, je souhaite continuer à jouer de la musique le plus longtemps possible ! », concluait-il.

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